Aix
Solidarité, l'Association des Travailleurs Maghrébins de
France (ATMF), le Comité Méditerranéen pour les
droits de l'Homme en Tunisie, ont délégué deux
observateurs au procès en appel du « groupe de Soliman
» accusé d'avoir participé à un affrontement
armé avec la police et l'armée tunisiennes qui les
poursuivaient. Selon les déclarations officielles,
l'affrontement s'est soldé par la mort de 12 membres du groupe,
celle d'un policier et d'un membre de l'armée et par
l'arrestation de 15 personnes sur les lieux de la fusillade alors que
30 prévenus ont été jugés.
Trois raisons principales motivent l'envoi d'observateurs : la peine de mort par pendaison prononcée en première instance contre deux des prévenus, la torture pratiquée sur les prévenus pendant la procédure d'instruction, les atteintes portées aux droits de la défense au cours du procès en première instance.
La peine de mort
Deux des 30 inculpés du groupe de Soliman » ont été condamnés à mort
en première instance, alors que les autres prévenus
étaient condamnés à de très lourdes peines
de prison (huit à la prison à perpétuité,
sept à trente ans, deux à vingt ans, deux à quinze
ans, deux à douze ans et deux à dix ans de prison ferme,
trois autres respectivement à 8, 7, 6 et deux à 5 ans de
prison ferme).
La peine de mort continue à être prononcée par les tribunaux tunisiens mais elle n'a plus été exécutée depuis 1994.
En raison des faits jugés dans cette affaire, les avocats de la
défense craignent qu'elle ne soit à nouveau mise à
exécution et entendent mobiliser l'opinion internationale contre
sa remise à l'ordre du jour.
La torture
Le
procès en appel s'est ouvert le vendredi 8 février
à Tunis en présence d'un important déploiement
policier autour du tribunal et dans la salle d'audience (plus de 30
policiers en uniforme dans la salle sans compter les policiers en
civil). Commencée à 9 heures 30, avec une interruption
entre 13 heures 30 et 15 heures 45, l'audience a été
interrompue brutalement à 18 heures (la suite du procès
étant reportée au 12 février) après qu'un
des accusés déclare ne pas se sentir capable
d'énoncer les sévices qu'il a subis. Au cours des 15
auditions réalisées pendant cette audience tous les
accusés ont déclaré que les aveux ont
été arrachés sous la torture et un certain nombre
d'entre eux nient les faits qui leurs sont reprochés.
Les droits de la défense
En
première instance une quarantaine d'avocats du collectif de
défense des prisonniers s'est retirée du procès en
raison de graves irrégularités et violations de
procédures dont :
- Les
agressions policières de la brigade d’intervention rapide
à l’encontre des accusés au cours de
l’audience du 15/12/2007, sous le regard indifférent du
juge
- L’empêchement
fait aux avocats de jouer leurs rôles en les privant notamment
d’un délai raisonnable pour préparer la
défense
- Le rejet de toutes les demandes d’examens médicaux formulées par la défense
Le
procès en appel a débuté par la lecture de l'acte
d'accusation. Jusqu'à 13h30 le président du tribunal a
interrogé longuement les accusés une certaine
aménité. A la reprise des auditions vers 16 heures le
rythme des interrogatoires s'est s'accéléré.
Cependant les conditions de déroulement du procès peuvent être qualifiées par euphémisme, « d'anormales ».
Dans une salle exigüe qui outre les magistrats et les 30
accusés doit recevoir plus de 30 policiers, une quarantaine
d'avocats de la défense, 6 avocats de la partie civile, les
familles des accusés, le public, quelques observateurs
internationaux, (d'Amnesty International, de l'ATMF, du barreau de
Paris, de la Fédération Internationale des Droits de
l'Homme (FIDH), d'Aix Solidarité....), les allées et
venues incessantes dans la salle d'audience, les paroles des
accusés s'exprimant sans micro, se perdent souvent dans le
brouhaha de la salle. L'installation des avocats , la plupart se
retrouvant debout dans les allées centrales et latérales
de la salle ne permettent ni une écoute et un travail « normal ».
Alors que se poursuit le procès en appel nous appelons
l'ensemble des associations, syndicats, partis politiques, les organes
de presse, les élus et les citoyens à se mobiliser pour
le droit à la vie, l'abolition de la peine de mort , contre la
torture et pour le respect de la dignité humaine, le respect des
droits à la défense pour tous les condamnés en
Tunisie.
Laure Magronne
Présidente Aix Solidarité
Naceur El Idrissi
Président ATMF Aix