La chasse aux déchets radioactifs est ouverte sur le campus Valrose

Nice Matin - samedi 21 juin 2008


Epinglée par l'Autorité de sûreté nucléaire, la fac de sciences cherche à se débarrasser de cet encombrant « héritage ». Opération délicate et coûteuse
 
La faculté de sciences peine à se débarrasser des déchets qui lui ont valu un carton jaune de la part de l'Autorité de sûreté nucléaire. Ils restent pour l'heure entreposés dans des bâtiments vieillissants et délabrés.

Des déchets radioactifs à l'ombre des palmiers. Sur le verdoyant campus Valrose, cette incongruité ne saute pas aux yeux du visiteur. Sauf quand celui-ci est un expert de l'Autorité de sûreté nucléaire. L'ASN a collé un carton jaune à la faculté de sciences de Nice, après y avoir relevé deux infractions aux normes de gestion des déchets radioactifs. Or l'université peine à « se débarrasser de ce boulet », comme le qualifie le doyen Raymond Négrel.

Le 16 janvier, sa fac reçoit une visite inopinée de l'ASN. Pas déçue du voyage. Elle découvre, posée à même la paillasse d'un laboratoire, une source d'américium-béryllium, acquise en 1971 et non-autorisée depuis. Et un local stockant des déchets radioactifs, fermé, inaccessible, mais dont l'ASN ignorait l'existence. Son verdict : deux « avis d'incident » de niveau 1 sur l'échelle internationale, ce qui correspond à des « effets bénins ».

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Gestion peu rigoureuse

Autrement dit, sans impact sur la santé et l'environnement. Rien de bien grave ? Juste symptomatique, pour Laurent Kueny, chef de la division de Marseille de l'ASN, d'« une gestion de ces déchets souvent peu rigoureuse dans les facultés de sciences. Celle de Nice est conforme aux habitudes. Ces déchets n'ont aucune raison d'être là, d'autant qu'ils pourraient être dérobés... »

« C'est un héritage », justifie Raymond Négrel. « Dans le passé, des autorisations ont été accordées à des laboratoires qui ont fermé depuis. Lors de départs à la retraite, certains chercheurs ont laissé derrière eux des morceaux d'uranium... »

Des scientifiques qui laissent traîner leurs petites affaires ? Pas très sérieux, tout ça... D'autant que l'ASN, rappelle Laurent Kueny, dispose « de réels moyens de coercition », type PV ou mise en demeure. En outre, la fac niçoise avait été épinglée à deux reprises au milieu des années 90 pour des motifs similaires. Elle avait même voté sa propre fermeture, symbolique, faute de pouvoir financer un enlèvement de césium 137 !

Onéreux enlèvements

A priori rien de tel cette fois-ci. Laurent Kueny note « que la faculté répond à notre demande. Mais nous viendrons vérifier... » Raymond Négrel entend en effet évacuer ces déchets, « une partie en juillet, le reste fin 2008. Et même si cela implique des opérations à plusieurs dizaines de milliers d'euros, car le transport est très coûteux... »

Impossible selon lui d'aller plus vite. L'amérycium-béryllium ? « L'entreprise qui doit les enlever a du retard ». Les déchets mal stockés ? « Difficile à traiter, car il faut connaître les échantillons. On a procédé à une première élimination, on attend à présent la venue du Centre d'énergie atomique (CEA) ».

En attendant, les déchets restent stockés dans des locaux « sécurisés ». Et la fac va créer un poste « hygiène et sécurité ». Elle est en tout cas restée discrète sur cette histoire de déchets, qui ne s'est pas propagée comme une traînée de poudre.

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