Gap, la dimenja 2 de decembre de 2 007
Objet : occitan / langue d'oc
Monsieur le Recteur,
Vous
avez mis en place, selon les instructions officielles, le Conseil
Académique des Langues et Cultures Régionales. Je me
réjouis de cette initiative qu'aucun de vos
prédécesseurs n'avait eu le courage de prendre.
Cependant,
vous savez combien il est difficile, dans notre région,
d'utiliser une terminologie adaptée pour désigner notre
langue régionale. Je regrette que de nombreux documents
officiels n'utilisent que le mot
« provençal » alors que la terminologie
officielle présente dans tous les textes nationaux (et qui fait
consensus) est « occitan / langue d'oc ».
Le
mot « provençal » est ambigu, il
désignait au Moyen-Âge l'ensemble de la langue d'oc,
acception qui a perduré jusqu'à Mistral et
au-delà. On employait alors aussi
« limousin » ou « gascon »
pour désigner l'ensemble des parlers d'oc. Vous n'ignorez pas
que d'aucuns voudraient qu'on parle DES langues d'oc (au pluriel) alors
que tous les linguistes sérieux reconnaissent l'unité de
LA langue d'oc au singulier, riche de toute sa diversité.
La
langue d'oc se compose de six grands dialectes : auvergnat,
gascon, languedocien, limousin, provençal (avec ses
sous-dialectes rhodanien, maritime et niçois, certains classant
ce dernier à part -quasiment comme un septième dialecte-)
et vivaro-alpin -ou alpin-, certains utilisant à tort le terme
de provençal-alpin (puisqu'il s'agit de deux dialectes
différents de la langue d'oc) ou encore alpin d'oc, appellation
qui n'a rien d'officiel ni de justification autre que de vouloir
ménager la chèvre et le chou, si vous voulez bien me
passer l'expression.
Dans
l'académie d'Aix-Marseille que vous dirigez, deux de ces grands
dialectes sont présents : l'occitan provençal et
l'occitan alpin (ou vivaro-alpin). On s'aperçoit alors
facilement qu'il devient non seulement réducteur mais aussi faux
d'utiliser le terme provençal pour recouvrir toute la
réalité de la langue d'oc dans notre région.
Dans
un souci de clarté, de cohérence et de respect de la
dignité de la langue occitane, je souhaiterais l'utilisation par
les services rectoraux et académiques du terme officiel
d' « occitan / langue d'oc ».
Permettez-moi, Monsieur le Recteur, de vous présenter quelques arguments pour étayer ma demande.
1
) Frédéric Mistral, fondateur du Félibrige et prix
Nobel de littérature indique au fronton de son œuvre
majeure : LOU TRESOR DÓU FELIBRIGE ou DICTIONNAIRE
PROVENÇAL-FRANÇAIS embrassant LES DIVERS DIALECTES DE LA
LANGUE D'OC MODERNE. Je me permets de vous faire remarquer qu'il
utilise le singulier pour désigner LA langue d'oc. Il emploie le
mot « PROVENÇAL » dans son acception
ancienne exactement synonyme d'occitan.
2 )
La région Provence Alpes Côte d'Azur fait partie, dans son
intégralité, du domaine de langue d'oc. Serions-nous le
no man's land entre les vallées occitanes d'Italie et tout le
reste du domaine d'oc (Auvergne, Languedoc, Limousin, Gascogne)
où un parler étrange refuserait sa dénomination
d' « occitan / langue d'oc » pour n'utliser
que le terme de
« provençal » ?
3 )
N'entretenons pas la confusion entre le tout et la partie. Aujourd'hui,
le mot provençal doit désigner le dialecte de langue d'oc
parlé en Provence, mais pas l'ensemble des dialectes
parlés en Provence Alpes Côte d'Azur ou dans
l'académie d'Aix-Marseille. Le « tout »
est la langue occitane, le terme de
« provençal » ne devrait désigner
aujourd'hui que sa « partie »
oriento-méridionale.
Je vous prie d'accepter; Monsieur le Recteur, l'expression de mes salutations les plus respectueuses.
Monsieur Michèu PRAT