Académie Française et Sénat : Des bandes de jeunes qui s'éclatent...

SOMMAIRE

Déclaration de l'Académie française : «Les conséquences du texte voté par l'Assemblée sont graves»
Réponse de Régions et Peuples Solidaires : La « Royale » Académie française s’oppose à la reconnaissance constitutionnelle des langues régionales
Aux membres de l'Académie Française - Communiqué de presse de l'Institut d'Estudis Occitans
Lettre ouverte aux « Habits verts »… de gris ? - par Georges LABOUYSSE
Jean JAURES et le bilinguisme I - L'Education Populaire et les "patois"
Jean JAURES et le bilinguisme II - Méthode comparée

Le Sénat a refusé le mercredi 18 Juin d'inscrire la reconnaissance des langues régionales dans la Constitution
Langues régionales : poursuivre l'ouverture
Lo vòte de vòstre senator
Compte rendu analytique officiel du 18 juin 2008 - Modernisation des institutions de la Ve République (Edifiant)
« La peine » du 18 juin :  les sénateurs s’opposent à la reconnaissance constitutionnelle des langues régionales
Position d'INFÒC envoyée au groupe CRC du Sénat qui a voté contre la reconnaissance des langues dans la Constitution
Les séparatistes ne sont pas ceux que l'on croit, par Christian Guyonvarc'h
L'humanité : Langues régionales : Jaurès, Cachin et les autres




Parla ta lenga SONDAGE : Les Français favorables aux langues régionales dans la Constitution

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On est les loin des quartiers nord de Marseille...
Déclaration de l'Académie française

Depuis plus de cinq siècles, la langue française a forgé la France. Par un juste retour, notre Constitution a, dans son article 2, reconnu cette évidence: «La langue de la République est le français».

Or, le 22 mai dernier, les députés ont voté un texte dont les conséquences portent atteinte à l'identité nationale. Ils ont souhaité que soit ajoutée dans la Constitution, à l'article 1er, dont la première phrase commence par les mots: «La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale», une phrase terminale: «Les langues régionales appartiennent à son patrimoine».

Les langues régionales appartiennent à notre patrimoine culturel et social. Qui en doute? Elles expriment des réalités et des sensibilités qui participent à la richesse de notre Nation. Mais pourquoi cette apparition soudaine dans la Constitution?

Le droit ne décrit pas, il engage. Surtout lorsqu'il s'agit du droit des droits, la Constitution.

Au surplus, il nous paraît que placer les langues régionales de France avant la langue de la République est un défi à la simple logique, un déni de la République, une confusion du principe constitutif de la Nation et de l'objet d'une politique.

Les conséquences du texte voté par l'Assemblée sont graves. Elles mettent en cause, notamment, l'accès égal de tous à l'Administration et à la Justice. L'Académie française, qui a reçu le mandat de veiller à la langue française dans son usage et son rayonnement, en appelle à la Représentation nationale. Elle demande le retrait de ce texte dont les excellentes intentions peuvent et doivent s'exprimer ailleurs, mais qui n'a pas sa place dans la Constitution.


Régions et Peuples Solidaires
La « Royale » Académie française s’oppose
à la reconnaissance constitutionnelle des langues régionales
                    
Lors de sa séance du 12 juin 2008, l’Académie française a adopté à l’unanimité une déclaration s’opposant à la reconnaissance constitutionnelle des langues régionales votée par les députés français le 22 mai. L’Académie française précise que la mention des langues régionales dans l’article 1 de la constitution constitue selon elle « un déni de la République… et met en cause l’accès égal de tous à l’Administration et à la Justice. »
« Régions et peuples solidaires » condamne ces propos qui, en plus d’être intolérants et diffamatoires, sont totalement dépourvus de fondements juridiques : la reconnaissance  des langues régionales dans l’article 1 de la constitution ne confère aucun droit à utiliser les langues régionales dans la sphère publique, conformément aux souhaits de la Ministre de la Culture, Christine Albanel.

Le discours mensonger  de l’Académie française est choquant à plusieurs titres :

1-ces propos discriminatoires sont en contradiction avec les conventions européennes et internationales en matière de droits culturels signés par la France.

2-Fondée en 1635 sous le règne de Louis XIII par le cardinal De Richelieu, cette institution « monarchique » s’oppose au vote « démocratique » des députés républicains, représentants des citoyens.

3-Le rôle de l’Académie française est double : veiller sur la langue française et accomplir des actes de mécénat. S’opposer à des éléments de projets de loi en s’attaquant au respect de la diversité culturelle est un acte qui outrepasse ses compétences.

Face aux propos archaïques de l’Académie française, la fédération « Régions et peuples solidaires » appelle à une réaction explicite des parlementaires,  du gouvernement ainsi que du Président de la République qui prônait avant les élections présidentielles une « République irréprochable ».

Philippe Sour, chargé de communication R&PS
Le 17 mai 2008
Contact-presse : Philippe Sour - 06 13 52 05 48 – 
Régions et Peuples Solidaires - 2 carrièra Pech de Galez - 81600 Galhac.
contact@r-p-s.infowww.r-p-s.info


Institut d'Estudis Occitans
Aux membres de l'Académie Française
Communiqué de presse de l'Institut d'Estudis Occitans


Vous prétendez sauver l'identité nationale de la France en demandant aux députés de revenir sur la reconnaissance des langues régionales dans la constitution qu'ils ont votée le 22 mai dernier. Vous dites ne pas douter de l'intérêt patrimonial de nos langues. Mais c'est faux, tant votre communiqué est plein d'amertume, de ressentiment et de peur ! Déjà en 1951 au moment du vote de la loi Deixonne (première loi sur l'enseignement des langues régionales) votre institution avait fait la même demande. Et pourtant il ne s'agissait que d'une toute petite loi.

Soixante ans après vous recommencez ! Votre coupole vous empêche t-elle de voir le ciel, de sentir le monde et de voir comme il change ? Les députés eux ont compris que le monde avait changé. Ils n'ont pas eu peur d'introduire dans la Constitution, la reconnaissance des langues de France.

Votre texte est une vision étriquée de la culture, je le ressens comme plein de mépris pour l'autre. Ce mépris est-il si grand que vous ne soyez capables d'accepter les différences ? N'êtes vous pas à même de comprendre qu'il y a des citoyens français de langue occitane, bretonne, basque, catalane, corse
et autres et qui savent aussi le français. Ne savez-vous pas que les valeurs de la République s'expriment et se sont exprimées dans toutes ces langues.

Ainsi vous seriez propriétaires de l'identité nationale, de la Nation ? Ainsi vous auriez le droit de dire aux citoyens ce qu¹ils sont et comment ils doivent l'être? Quelle est votre légitimité?  Je suis citoyen français comme vous. Enfin non, pas comme vous ! Plus que vous en ce jour où vous passez les limites du ridicule. Je me sens citoyen parce que je me bats pour une citoyenneté riche, diverse, colorée.

Votre vision du monde est triste et celle que vous donnez de la France est bien triste aussi.
Alors je vous le dis : Libertat, Egalitat, Fraternitat !

Voilà une devise dont vous n'êtes pas les propriétaires. Elle dépasse largement les idées vieillotes qui sont dans votre communiqué, quand on l'écrit  en occitan, en français ou n'importe quelle autre langue.

David Grosclaude, Président de l'Institut d'Estudis Occitans
06.83.01.19.37
Institut d'Estudis Occitans
11 carrièra Malcosinat
31000 TOLOSA / TOULOUSE

direccion@ieo-oc.org


Lettre ouverte aux « Habits verts »… de gris ?


« J’ai été frappé de voir, au cours de mon voyage à travers les pays latins,
que, en combinant le français et le languedocien et par une certaine habitude des analogies,
je comprenais en très peu de jours le portugais et l’espagnol […]. »

Jean Jaurès
15 octobre 1911
(Revue de l’Enseignement primaire)
« Le 22 mai dernier, les députés ont voté un texte
(Les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France)
dont les conséquences portent atteinte à l’identité nationale.
[…] Un déni de la République […]. »

Déclaration de l’Académie française 12 juin 2008

Vous voici donc de nouveau en croisade, l’épée en avant, contre les peuples de France… exactement 800 ans (1209-2009) après l’invasion française du Comté de Toulouse par les armées de Simon de Montfort, dont le premier acte « héroïque » fut le massacre de toute la population occitane de Béziers le 21 juillet 1209.
Ce qui fait dire à un historien français bien connu, membre de votre Académie, que, dans cette guerre de conquête, « les Français se sont conduits comme des occupants. Ils ont massacré, tué, violé… comme les SS. C’est très désagréable d’entendre cela mais c’est la vérité. » Et comme l’écrit Henri Gougaud : « Il fallut deux siècles pour que les Occitans deviennent Français et bons Catholiques. Deux siècles de gestapo ». En effet, les bûchers, les tortures, les massacres en tout genre, sans oublier l’horrible inquisition furent autant de moyens utilisés pour coloniser un pays… avant d’interdire à ses enfants plus tard, avec des méthodes plus insidieuses, de parler leur langue maternelle historique – et non pas régionale !

On aurait pu imaginer que ce « bon vieux temps » des colonisations était passé et qu’une vénérable institution comme l’A.F. (Académie Française… et non Algérie Française !) ferait preuve au XXIe siècle d’une ouverture d’esprit plus positive et d’une connaissance de l’Histoire des peuples de France plus tolérante. Mais non !
Il aura fallu quelques mots dans l’article 1 de la Constitution –le minima du minima- qui ne change rien par rapport au français, pour que vous outrepassiez le domaine de vos compétences en adoptant une position politique idéologique rétrograde. Et pourtant, je serais tenté de dire que l’enfermement des langues de France dans le musée du patrimoine et le maintien du seul français dans l’article 2 est une non-reconnaissance de nos langues, comme s’en vante d’ailleurs Madame Albanel, ministre de la culture, ce qui place notre pays au ban des démocraties européennes en la matière. Et pour vous, c’est encore trop ?

A vous entendre, le français serait menacé par le bilinguisme ? Mais dans quel univers vivez-vous ? Tous nos Etats voisins sont fédéraux politiquement et bi- ou multilingues culturellement : est-ce à dire qu’ils ne se comprennent pas ? Seule une certaine France nationaliste agite encore la crête de son coq gaulois pour écarter la diversité démocratique, fidèle qu’elle est aux mythes de son « Histoire de France » imaginée au XIXe siècle, pour servir l’idéologie des conquêtes coloniales ; une Histoire falsifiée qui ignore superbement ou dénigre systématiquement les hommes et les femmes des territoires conquis.

J’ai eu personnellement la chance de rencontrer comme élève des enseignants plus intelligents qui nous apprenaient le français à partir de l’occitan et qui considéraient, comme Jaurès, que « pour l’expansion économique comme pour l’agrandissement intellectuel de la France du Midi », le vrai bilinguisme est « un problème de la plus haute importance ». De même mes parents et mes grands-parents, militants républicains, parlaient deux langues –occitan et français-. Et ne vous en déplaise, la république ne s’est pas écroulée pour autant… du moins pas pour ces raisons-là.

Je suis fier de posséder cette double culture et je suis navré de voir qu’aujourd’hui, après un XXe siècle de nationalisme exacerbé aux conséquences criminelles, on puisse entendre encore, dans un cercle de personnes supposées respectables, des propos exaltant la supériorité universelle d’une langue d’Etat, à la manière de Jules Ferry qui lançait la France à l’assaut de l’Afrique et de l’Asie au nom de la « supériorité de la race blanche » pour répandre « les lumières du progrès et de la liberté contre l’ignorance et la barbarie ».
Par vos propos, vous humiliez les peuples de France et vous êtes en cela les dignes héritiers de Jules Michelet qui dénigrait les Occitans à propos de la guerre de conquête dite « des Albigeois » en ces termes :  « […] Les mangeurs d’ail, d’huile et de figues rappelaient aux croisés l’impureté du sang mauresque et juif…, et le Languedoc leur semblait une autre Judée »…

Voyez-vous, vos positions idéologiques et communautaristes de l’Ile de France (la « little France » comme l’appelaient les Anglais au XIe siècle), qui visent à interdire la diversité culturelle, va rapidement se retourner contre le français… au profit de l’anglais et je le déplore.

Alors il est encore temps d’ouvrir les yeux… avant de faire entrer Monsieur Mélenchon sous la coupole.
Le 17 juin 2008
Georges LABOUYSSE
Instituteur à la retraite
Rue Marius Cazeneuve
31340 Bondigoux
(Tél : 0561538102)


L'Education Populaire et les "patois"

« Il y a un an, dans le loisir d’esprit de nos vacances parlementaires, j’avais discuté la thèse de ceux qui croient pouvoir ressusciter en France une civilisation méridionale autonome et faire de la langue et de la littérature du Languedoc et de la France un grand instrument de culture. J’avais établi, je crois, qu’il y a là une grande part de chimère, que la langue et la littérature de la France étaient désormais et seraient de plus en plus pour tous les Français le moyen essentiel de civilisation, qu’au demeurant l’entreprise méridionale n’avait pas le caractère « populaire » et spontané qu’on affectait d’y voir ; qu’elle était pour une large part l’œuvre préméditée de bourgeois cultivés, pénétrés des lettres classiques, et qui avaient retrouvé et ranimé, par érudition autant que par inspiration des sources longtemps endormies ; j’ajouterai qu’au demeurant la création littéraire de ces hommes était souvent raffinée, plus large et virgilienne, mais de forte tradition païenne avec Fourès ; amoureuse, vivante, et passionnée mais de tour et de souvenir hellénique chez Aubanel ; et que seuls ceux qui connaissaient les grands chemins battus du Parnasse et de l’Olympe pouvaient goûter tout le charme de ces sentiers sinueux de la poésie méridionale qui courent en feston le long des grandes routes glorieuses.

Mais je disais aussi avec une force de conviction qui ne fait que s’accroître que ce mouvement du génie méridional pouvait être utilisé pour la culture du peuple du Midi. Pourquoi ne pas profiter de ce que la plupart des enfants de nos écoles connaissent et parlent encore ce que l’on appelle d’un nom grossier « le patois ». Ce ne serait pas négliger le français : ce serait le mieux apprendre, au contraire, que de le comparer familièrement dans son vocabulaire, sa syntaxe, dans ses moyens d’expression, avec le languedocien et le provençal. Ce serait, pour le peuple de la France du Midi, le sujet de l’étude linguistique la plus vivante, la plus familière, la plus féconde pour l’esprit. Par là serait exercée cette faculté de comparaison et de raisonnement, cette habitude de saisir entre deux objets voisins, les ressemblances et les différences, qui est le fond même de l’intelligence. Par là aussi, le peuple de notre France méridionale connaît un sentiment plus direct, plus intime, plus profond de nos origines latines. Même sans apprendre le latin, ils seraient conduits, par la comparaison systématique du français et du languedocien ou du provençal, à entrevoir, à reconnaître le fonds commun de latinité d’où émanent le dialecte du Nord et le dialecte du Midi. Des siècles d’histoire s’éclaireraient en lui et, penché sur cet abîme, il entendrait le murmure lointain des sources profondes. Et tout ce qui donne de la profondeur à la vie est un grand bien. Aussi, le sens du mystère qui est pour une grande part le sens de la poésie, s’éveille dans l’âme. Et elle reçoit une double et grandiose leçon de tradition et de révolution, puisqu’elle a, dans cette chose si prodigieuse et si familière à la fois qu’est le langage, la révélation que tout subsiste et que tout se transforme. Le parler de Rome a disparu, mais il demeure jusque dans le patois de nos paysans comme si leurs pauvres chaumières étaient bâties avec les pierres des palais romains.

Du même coup, ce qu’on appelle « le patois », est relevé et comme magnifié. Il serait facile aux éducateurs, aux maîtres de nos écoles de montrer comment, aux XIIe et XIIIe siècles, le dialecte du Midi était un noble langage de courtoisie, de poésie et d’art ; comment il a perdu le gouvernement des esprits par la primauté politique de la France du Nord, mais que de merveilleuses ressources subsistent en lui. Il est un des rameaux de cet arbre magnifique qui couvre de ses feuilles bruissantes l’Europe du soleil, l’Italie, l’Espagne, le Portugal. Quiconque connaîtrait bien notre languedocien et serait averti par quelques exemples de ses particularités phonétiques qui le distinguent de l’italien, de l’espagnol, du catalan, du portugais, serait en état d’apprendre très vite une de ces langues. Et même si on ne les apprend pas, en effet, c’est un agrandissement d’horizon de sentir cette fraternité du langage avec les peuples latins.

Elle est bien plus visible et sensible dans nos dialectes du Midi que dans la langue française, qui est une sœur aussi pour les autres langues latines, mais une sœur un peu déguisée, une sœur « qui a fait le voyage de Paris ». L’Italie, l’Espagne, le Portugal s’animent pour de plus hauts destins, pour de magnifiques conquêtes de civilisation et de liberté. Quelle joie et quelle force pour notre France du Midi si, par une connaissance plus rationnelle et plus réfléchie de sa propre langue et par quelques comparaisons très simples avec le français d’une part, avec l’espagnol et le portugais d’autre part, elle sentait jusque dans son organisme la solidarité profonde de sa vie avec toute la civilisation latine ! Dans les quelques jours que j’ai passés à Lisbonne, il m’a semblé plus d’une fois, à entendre dans les rues les vifs propos, les joyeux appels du peuple, à lire les enseignes des boutiques, que je me promenais dans Toulouse qui serait restée une capitale, qui n’aurait pas subi, dans sa langue une déchéance historique et qui aurait gardé, sur le fronton de ses édifices, comme à la devanture de ses plus modestes boutiques, aux plus glorieuses comme aux plus humbles enseignes, ses mots d’autrefois, populaires et royaux.

De se sentir en communication avec la beauté classique par les œuvres de ses poètes, de se sentir en communication par sa substance même avec les plus nobles langues des peuples latins, le langage de la France méridionale recevra un renouveau de fierté et de vie. Notre languedocien et notre provençal ne sont guère plus que des baies désertées, où ne passe plus le grand commerce du monde ; mais elles ouvrent sur la grande mer des langages et des races latines, sur cette « seigneurie bleue » dont parle le grand poète du Portugal.

Il faut apprendre aux enfants la facilité des passages et leur montrer par delà la barre un peu ensablée, toute l’ouverture de l’horizon.
J’aimerais bien que les instituteurs, dans leurs Congrès, mettent la question à l’étude. C’est de Lisbonne que j’ai écrit ces lignes, au moment de partir pour un assez lointain voyage, où je retrouverai d’ailleurs, de l’autre côté de l’Atlantique, le génie latin en plein épanouissement. C’est de la pointe de l’Europe latine que j’envoie à notre France du Midi cette pensée filiale, cet acte de foi en l’avenir, ces vœux de l’enrichissement de la France totale par une meilleure mise en œuvre des richesses du Midi latin. »

Jean Jaurès 
(« La Dépêche » – 15 août 1911)


Méthode comparée


« Il y a quelques semaines, j’ai eu l’occasion d’admirer en pays basque, comment un antique langage, qu’on ne sait à quelle famille rattacher, avait disparu. Dans les rues de Saint-Jean-de-Luz on n’entendait guère parler que le basque, par la bourgeoisie comme par le peuple ; et c’était comme la familiarité d’un passé profond et mystérieux continué dans la vie de chaque jour. Par quel prodige cette langue si différente de toutes autres s’est-elle maintenue en ce coin de terre ? Mais quand j’ai voulu me rendre compte de son mécanisme, je n’ai trouvé aucune indication. Pas une grammaire basque, pas un lexique basque dans Saint-Jean-de-Luz où il y a pourtant de bonnes librairies. Quand j’interrogeais les enfants basques, jouant sur la plage, ils avaient le plus grand plaisir à me nommer dans leur langue le ciel, la mer, le sable, les parties du corps humain, les objets familiers ! Mais ils n’avaient pas la moindre idée de sa structure, et quoique plusieurs d’entre eux fussent de bons élèves de nos écoles laïques, ils n’avaient jamais songé à appliquer au langage antique et original qu’ils parlaient dès l’enfance, les procédés d’analyse qu’ils sont habitués à appliquer à la langue française. C’est évidemment que les maîtres ne les y avaient point invités. Pourquoi cela, et d’où vient ce délaissement ? Puisque ces enfants parlent deux langues, pourquoi ne pas leur apprendre à les comparer et à se rendre compte de l’une et de l’autre ? Il n’y a pas de meilleur exercice pour l’esprit que ces comparaisons ; cette recherche des analogies et des différences en une matière que l’on connaît bien est une des meilleures préparation de l’intelligence. Et l’esprit devient plus sensible à la beauté d’une langue basque, par comparaison avec une autre langue il saisit mieux le caractère propre de chacun, l’originalité de sa syntaxe, la logique intérieure qui en commande toutes les parties et qui lui assure une sorte d’unité organique.

Ce qui est vrai du basque est vrai du breton. Ce serait une éducation de force et de souplesse pour les jeunes esprits ; ce serait aussi un chemin ouvert, un élargissement de l’horizon historique.

Mais comme cela est plus vrai encore et plus frappant pour nos langues méridionales, pour le limousin, le languedocien, le provençal ! Ce sont, comme le français, des langues d’origine latine, et il y aurait le plus grand intérêt à habituer l’esprit à saisir les ressemblances et les différences, à démêler par des exemples familiers les lois qui ont présidé à la formation de la langue française du Nord et de la langue française du Midi. Il y aurait pour les jeunes enfants, sous la direction de leurs maîtres, la joie de charmantes et perpétuelles découvertes. Ils auraient aussi un sentiment plus net, plus vif, de ce qu’a été le développement de la civilisation méridionale, et ils pourraient prendre goût à bien des œuvres charmantes du génie du Midi, si on prenait soin de les rajeunir un peu, de les rapprocher par de très légères modifications du provençal moderne et du languedocien moderne.

Même sans étudier le latin, les enfants verraient apparaître sous la langue française du Nord et sous celle du Midi, et dans la lumière même de la comparaison, le fonds commun de latinité, et les origines profondes de notre peuple de France s’éclaireraient ainsi, pour le peuple même, d’une pénétrante clarté. Amener les nations et les races à la pleine conscience d’elles-mêmes est une des plus hautes œuvres de civilisation qui puissent être tentées. De même que l’organisation collective de la production et de la propriété suppose une forte éducation des individus, tout un système de garanties des efforts individuels et des droits individuels, de même la réalisation de l’unité humaine ne sera féconde et grande que si les peuples et les races, tout en associant leurs efforts, tout en agrandissant et complétant leur culture propre par la culture des autres, maintiennent et avivent dans la vaste Internationale de l’humanité, l’autonomie de leur conscience historique et l’originalité de leur génie.

J’ai été frappé de voir, au cours de mon voyage à travers les pays latins, que, en combinant le français et le languedocien, et par une certaine habitude des analogies, je comprenais en très peu de jours le portugais et l’espagnol. J’ai pu lire, comprendre et admirer au bout d’une semaine les grands poètes portugais. Dans les rues de Lisbonne, en entendant causer les passants, en lisant les enseignes, il me semblait être à Albi ou à Toulouse.

Si, par la comparaison du français et du languedocien, ou du provençal, les enfants du peuple, dans tout le Midi de la France, apprenaient à retrouver le même mot sous deux formes un peu différentes, ils auraient bientôt en main la clef qui leur ouvrirait, sans grands efforts, l’italien, le catalan, l’espagnol, le portugais. Et ils se sentiraient en harmonie naturelle, en communication aisée avec ce vaste monde des races latines, qui aujourd’hui, dans l’Europe méridionale et dans l’Amérique du Sud, développe tant de forces et d’audacieuses espérances. Pour l’expansion économique comme pour l’agrandissement intellectuel de la France du Midi, il y a là un problème de la plus haute importance, et sur lequel je me permets d’appeler l’attention des instituteurs. »


Jean Jaurès
("Revue de l'Enseignement Primaire"  - 15 octobre 1911)


Le Sénat a refusé le mercredi 18 Juin d'inscrire la reconnaissance des
langues régionales dans la Constitution

PARIS (AFP) - Mercredi 18 juin, 20h24 -


Le Sénat a refusé mercredi d'inscrire la reconnaissance des langues régionales dans la Constitution, revenant sur une disposition votée en ce sens par les députés en première lecture du projet de réforme des institutions.

Les sénateurs, par 216 voix contre 103, ont adopté, contre l'avis du gouvernement et de la commission des Lois, un amendement supprimant la référence aux langues régionales que les députés avaient ajoutée au texte initial.

La majorité UMP mais aussi les centristes, les communistes, les radicaux -dont l'ancien PS Michel Charasse- et quelques sénateurs PS, comme Robert Badinter ou Jean-Luc Mélenchon, ont voté la suppression. La majorité du PS, les Verts et quelques UMP ont en revanche voté contre.

Le 22 mai, l'Assemblée nationale avait décidé à la quasi-unanimité d'ajouter au premier article de la Constitution une phrase stipulant que "les langues régionales appartiennent au patrimoine" de la Nation.



PARTIT OCCITAN
Langues régionales : poursuivre l'ouverture            

Par son refus de suivre les députés sur la modification de l'article 1 de la constitution visant à reconnaître les langues régionales, le Sénat français à conforté son image traditionnelle de chambre conservatrice.

Ce refus d'avancer sur la question linguistique, a malheureusement trouvé des avocats dans tous les camps mais nous saluons les 103 courageux, qui ont manifesté leur ouverture, par delà les différences politiques.

Le Partit Occitan demande aux parlementaires (députés et sénateurs) de poursuivre sur la voie de la reconnaissance des langues régionales dans la Constitution, conformément aux recommandations du "Comité des droits économiques, sociaux et culturels" des Nations Unies.

Une France sourde à sa propre diversité ne saurait être crédible quand elle la défend au niveau international.


PARTIT OCCITAN
BP 31,
16270 ROMASIERAS
partitoccitan@free.fr /  http://partitoccitan.org


Sénat
Compte rendu analytique officiel du 18 juin 2008
Modernisation des institutions de la Ve République (Edifiant)




 M. le président.  - Nous reprenons l'examen du projet de loi de modernisation des institutions de la Ve République.

Discussion des articles (Suite) Article premier A

L'article premier de la Constitution est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les langues régionales appartiennent à son patrimoine. »

M. le président.  - Amendement n°3 rectifié, présenté par M. Charasse, Mme Goulet et M. Fortassin.

Supprimer cet article.

M. Michel Charasse. - Lors d'une révision de la Constitution, les propositions les plus inattendues surgissent. J'ai été surpris, avec d'autres, de voir apparaître à l'Assemblée nationale un amendement tendant à classer les langues régionales au patrimoine de la France. Pourquoi ne pas y classer aussi les monuments historiques ou même la gastronomie, que certains verraient de surcroît au patrimoine de l'humanité ? Voir la potée auvergnate ainsi distinguée, je n'osais en rêver... (Sourires)

Cet article premier A n'a rien à faire dans la Constitution. (Applaudissements sur plusieurs bancs à droite) Que la langue française soit celle de la République, cela va de soi ; aller au-delà, c'est véritablement inouï. De deux choses l'une : ou la mention ne sert à rien, ou elle cache quelque chose. M. Hyest nous dit, ce que je crois, qu'elle n'a pas de portée normative. Mais je suis persuadé que ceux qui l'on introduite, qui ne sont ni médiocres ni naïfs et qui savent donc qu'elle n'en a pas, y ont vu un moyen de contourner la décision du Conseil constitutionnel faisant obstacle à la ratification de la Charte des langues régionales -parce que celle-ci porte atteinte à l'unicité de la France, à l'indivisibilité de la République et au principe d'égalité des citoyens devant la loi.

Ou cet article est inutile, et il faut le supprimer ; ou la protection des langues régionales ne pourrait passer demain que par la ratification de la Charte, et il est dangereux. (Applaudissements sur plusieurs bancs à droite)

M. le président.  - Amendement identique n°77, présenté par MM. Gélard, Portelli et Lecerf.

M. Patrice Gélard - Je suis en parfait accord avec ce que vient de dire M. Charasse. J'ajouterai seulement ceci : je ne sais pas très bien ce qu'est le patrimoine national. Cette notion est tellement floue qu'on pourrait bien inscrire demain dans la Constitution la franc-maçonnerie, le christianisme et les cathédrales, qui font aussi partie de notre patrimoine.

M. Jean-Luc Mélenchon. - Pas de la même manière, mon cher ! (Rires)

 M. Patrice Gélard - Nous souhaitons donc que cet ajout à l'article premier A soit supprimé.

M. Michel Charasse. - Très bien !


M. le président.  - Amendement identique n°145, présenté par M. Mélenchon

M. Jean-Luc Mélenchon.
 - Vous connaissez déjà mon point de vue sur la question des langues régionales : j'ai eu l'occasion de l'exposer à l'occasion d'un débat consécutif à une question posée par M. Alfonsi. Nos travaux sont suivis avec attention par les partisans des langues régionales, pas toujours très raisonnables, et même souvent injurieux à mon égard. Il n'est pas question d'opposer le français aux langues régionales, ni de nier leur existence, leur intérêt ou leur contribution à la construction de l'identité française. Les soldats de Valmy ne parlaient pas tous la même langue, n'adoraient pas tous le même Dieu, n'utilisaient pas tous les mêmes unités de mesure. Les langues régionales ont donc contribué à l'Histoire de France, et singulièrement à la grande rupture républicaine : il n'est pas question de le nier. L'origine de ce débat, ce sont les dispositions du Conseil de l'Europe visant à protéger les minorités nationales dans les pays où elles sont menacées. Mais en France, jamais personne n'a été poursuivi ou inquiété en raison de sa langue maternelle, ni interdit d'accès à aucune fonction. On parle souvent des pratiques pédagogiques de la IIIe République, par lesquelles on aurait étouffé les langues régionales ; elles étaient rudes, certes, mais, à l'époque, la pédagogie était rude dans tous les domaines ! On ne peut pas en tirer argument pour dire que ceux qui ne parlaient pas français étaient un objet d'opprobre ! En tant qu'homme de gauche, je m'inscris dans la tradition de Jean Jaurès, de Marcel Cachin et des socialistes attachés à la promotion des langues régionales. La première loi qui les a reconnues est l'oeuvre d'un homme de gauche, Maurice Deixonne. Par la suite, la loi Toubon a élargi leur enseignement, mais c'est le gouvernement de Lionel Jospin qui a permis l'enseignement du corse à tous les niveaux et créé une option de langue régionale au baccalauréat.

M. Adrien Gouteyron. - C'est vrai !

M. Jean-Luc Mélenchon. - Nous partageons la volonté de promouvoir et de développer les langues régionales. La République française n'opprime personne. La seule question est de savoir si le cadre légal permet ce développement, et c'est le cas. Pourquoi alors introduire les langues régionales dans la Constitution ? On pense que celles-ci, qui sont supposément les langues maternelles, sont constitutives de l'identité particulière des personnes. Mais soyons précautionneux : d'autres particularités, comme la foi, sont tout aussi constitutives de l'identité. La République française respecte et garantit la liberté de conscience : il n'est donc pas besoin d'introduire dans la Constitution cette particularité.

Pourquoi donc nous le demande-t-on ? Je crains que la bonne volonté de ceux qui souhaitent à juste titre promouvoir les langues régionales n'ait été surprise. Il existe un parti ethniciste qui veut que l'on introduise cette mention dans la Constitution, afin de contraindre la France à ratifier la Charte des langues régionales. Le texte qui nous est soumis aujourd'hui paraît inoffensif, mais c'est parce que le Gouvernement a fait retirer certains amendements de l'Assemblée nationale visant explicitement à permettre cette ratification. Il est temps de dire avec fierté que notre patrie républicaine n'opprime pas les langues régionales ! N'introduisons pas une mention qui risquerait d'insinuer le doute à cet égard. Avant même la rédaction de la Charte des langues régionales, la France appliquait l'essentiel de ses dispositions.

M. Yves Détraigne. - Absolument !


M. Jean-Luc Mélenchon.
- Si nous ne l'avons pas signée, c'est seulement parce que certaines mesures nous paraissaient anticonstitutionnelles, comme l'introduction de différences de droits fondées sur la langue. Or la République ne fait aucune différence entre les citoyens selon leurs particularités. Affirmons haut et fort ses principes de laïcité, d'unité et d'indivisibilité ! (M. Robert Bret applaudit)

M. le président.  - Amendement identique n°157, présenté par Mme Borvo Cohen-Seat et les membres du groupe CRC.

M. Ivan Renar. - Nous sommes favorables au plurilinguisme et à la diversité culturelle ; les langues régionales y contribuent, et nous soutenons leur pratique et leur enseignement. Mais l'inscription des langues régionales dans l'article premier de la Constitution risquerait d'écorner les grands principes républicains. La République est l'oeuvre de tous, quelles que soient les particularités de chacun ; elle consacre ce qui rassemble plutôt que ce qui divise. Pourquoi introduire de tels particularismes dans la Constitution ? Aujourd'hui, ce sont les langues, demain ce seront les religions. Cette modification risque d'ailleurs d'apparaître comme discriminatoire : pourquoi ne reconnait-on pas aussi les langues des migrants ? Le français est une langue mouvante ; les parlers populaires, le langage des quartiers, les langues des immigrants contribuent à son évolution, au plan de la syntaxe, de la prononciation et du lexique. Par ailleurs, est-il opportun de mentionner les langues régionales avant le français, qui n'apparaît qu'à l'article 2, au moment où le français est menacé dans les institutions internationales et européennes ? Dans le contexte de la mondialisation, les langues nationales sont progressivement supplantées par l'anglais. Le 9 juin, Le Monde publiait un article intitulé « Alerte sur les langues », à propos de la perte d'influence du français et de l'allemand dans les institutions européennes ; en mars 2006, le président Chirac a quitté le Conseil européen parce que M. Seillère, chef des patrons français, s'y exprimait en anglais. Défendons le français ! La langue est le premier aspect du génie d'un peuple. L'Académie française a exprimé son inquiétude et demandé le retrait de cette disposition, dans une démarche très rare. La France applique déjà de nombreuses dispositions de la Charte des langues régionales, même si certaines améliorations sont souhaitables. Le français est une langue fédératrice, qui permet de donner corps aux principes de liberté, d'égalité et de fraternité ; tous différents, nous sommes tous égaux. L'ordonnance de Villers-Cotterêts, sous François Ier, a institué le français comme langue du royaume et des actes juridiques, permettant à chacun de comprendre et de se faire comprendre. La modification qui nous est proposée constituerait un net recul. Si depuis 1992, l'article 2 de la Constitution stipule que le français est la langue de la République, ce n'est pas contre les langues régionales mais contre l'envahissement de l'anglais.

Mme Albanel a d'ailleurs annoncé le dépôt d'un projet de loi destiné à organiser l'apprentissage et l'emploi des langues régionales ; mais on peut craindre que cette loi reste sans effet, faute de moyens. On nous dit que la lecture en classe de La princesse de Clèves n'a plus aucun intérêt. Comment croire alors que les oeuvres de Frédéric Mistral ou de Jules Mousseron figurent dans les programmes ?

La promotion des langues régionales est souhaitable mais elle ne doit pas conduire à l'enfermement régionaliste ou communautariste. Avoir des racines ne doit pas empêcher d'avoir des ailes. Nous appartenons à une grande communauté, qui est l'humanité. Nous invitons donc à supprimer cette mention. (Les sénateurs du groupe CRC applaudissent, ainsi que M. Jean-Luc Mélenchon)

M. le président.  - Amendement identique n°250 rectifié ter, présenté par M. Gouteyron, Mme Bernadette Dupont, MM. Gournac, Retailleau et Mme Papon.

M. Adrien Gouteyron. - Je me réjouis de constater que des amendements de suppression émanant de divers bancs se rejoignent. C'est un signe. Cet article de notre Constitution est fait pour rappeler, ainsi que l'ont souligné les orateurs qui m'ont précédé, ce qui nous rassemble, pas ce qui nous distingue. Relisez-en la teneur. La chute que l'on entend y ajouter est-elle à la hauteur de ce qui la précède ? (M. Michel Charasse approuve) Est-elle à la hauteur de la loi constitutionnelle ? Je ne le pense pas, et c'est pourquoi j'ai proposé cet amendement de suppression.

Je suis, moi aussi, attaché aux langues régionales. Je suis parmi vous un de ceux qui s'efforcent d'en parler une et de la promouvoir. Mais je reste persuadé que tous ceux qui, chez moi, ayant appris le français, continuent de parler leur langue régionale répondraient, si on les interrogeait, que la langue de leur pays est le français.

Le sujet est loin d'être anecdotique. Il est essentiel et je souscris pleinement à ce qui vient de se dire sur la Charte des langues régionales : maintenir cette phrase à l'article premier de notre Constitution signifierait que l'on veut conduire la France où elle ne veut pas aller. Si la France ratifiait cette Charte, il n'est pas de document interprétatif, quel qu'il soit, qui nous exonèrerait des obligations qu'elle emporte. (Applaudissements à droite et sur plusieurs bancs au centre)

M. le président.  - Amendement identique n°260 rectifié, présenté par MM. Détraigne, Deneux, Merceron, Mme Morin-Desailly, MM. Biwer, Fauchon, Jean-Léonce Dupont, Christian Gaudin, Zocchetto et Pozzo di Borgo.

M. Yves Détraigne. - Je me réjouis moi aussi qu'un amendement identique émane de plusieurs sensibilités et souscris à la plupart des propos qui ont été tenus. Je ne conteste pas que les langues régionales appartiennent à notre histoire ni qu'elles soient un des éléments constitutifs de notre patrimoine. Mais je ne vois pas, ou peut-être vois-je trop bien, pourquoi on veut l'inscrire dans notre Constitution. Notre loi fondamentale régit le fonctionnement de nos institutions. On ne peut impunément y introduire des dispositions déclaratives, placées là pour faire plaisir. Que les langues régionales appartiennent à notre patrimoine est sans rapport avec le fonctionnement de nos institutions. En inscrivant ici cette phrase, on ouvre la porte à des exigences qui pourraient remettre en cause l'unité nationale : ne permettrait-elle pas de réclamer, dans le futur, que l'apprentissage des langues régionales soit rendu obligatoire ou que certains documents publics soient publiés dans les deux langues ?

Et pourquoi s'en tenir là ? Pourquoi ne pas mentionner notre patrimoine paysager, notre patrimoine bâti -n'est-ce pas dans la cathédrale de Reims que Clovis fut baptisé par Saint Rémi ?

M. Nicolas About.  - Et le château de Versailles !

M. Yves Détraigne. - Allons-y ! Et pourquoi pas notre patrimoine culinaire !

M. Philippe Marini. - Et le champagne !

M. Yves Détraigne. - En effet ! Revenons à la raison, et préservons notre loi fondamentale. (Applaudissements sur plusieurs bancs au centre et à droite)

Modernisation des institutions de la Ve République (Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article premier A (Suite)

M. le président.  - Amendement n°95, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois.

Rédiger comme suit cet article :

I. L'article premier de la Constitution est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les langues régionales appartiennent à son patrimoine. »

II. - Le même article est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales. »

III. En conséquence, le dernier alinéa de l'article 3 de la Constitution est supprimé.

M. Jean-Jacques Hyest , rapporteur.  - Cet amendement a, ou peut-être devrais-je dire avait, deux objets.

La commission des lois n'avait pas jugé utile de remettre en cause le texte voté par l'Assemblée nationale, où les débats avaient été longs et vifs, considérant qu'il n'ouvrait pas la porte, tel quel, à une ratification de la Charte du Conseil de l'Europe.

L'autre question était celle de la place où l'on introduisait cette proposition. L'ôter de l'article premier pour la reporter à l'article 2, qui traite de la souveraineté, n'était pas satisfaisant. Seul le français est la langue de la République. Faut-il regretter que notre Constitution ne comporte pas d'article « balai », qui aurait permis d'introduire, outre la reconnaissance des langues régionales, les intéressantes propositions de M. Legendre sur la francophonie ? Tel n'est pas le cas.

Mais l'amendement a également un autre objet : il vise à replacer les dispositions relatives à l'égalité professionnelle et sociale dans l'article qui traite de l'égalité, au lieu de l'article 34 où elles n'ont pas leur place.

Double difficulté, donc. En tant que rapporteur de la commission, qui s'est prononcée, je ne puis qu'être défavorable aux amendements de suppression, mais je dois aussi constater que d'éminents membres de notre commission se prononcent en sa faveur. D'où mon embarras...

M. le président.  - Sous-amendement n°304 rectifié à l'amendement n° 95 de M. Hyest, au nom de la commission des lois, présenté par MM. Béteille et de Richemont.

Supprimer le I de l'amendement n°95.

M. Laurent Béteille. - J'aurais pu reprendre les arguments de la plupart des orateurs qui m'ont précédé. Mais j'ai choisi de préciser, par un sous-amendement, l'amendement de la commission, en indiquant à son président que je regrette de n'avoir pu être présent lorsqu'il a été exposé. Il me semble que la deuxième partie de l'amendement a bien sa place dans cet article, qui interdit toute discrimination -dont les discriminations en raison de la race, mention qui ne doit pas, à mon sens, être supprimée- même si je pense, avec M. Badinter, qu'elle manque un peu de concision.

En revanche, je propose la suppression de la référence incongrue aux langues régionales, qui n'a pas sa place dans la Constitution.

M. le président.  - Sous-amendement n°38 rectifié bis à l'amendement n° 95 de M. Hyest, au nom de la commission des lois, présenté par M. Cointat, Mmes Garriaud-Maylam et Kammermann.

Compléter le second alinéa du I de l'amendement n°95 par le mot : culturel

M. Christian Cointat.- J'ai pu être tenté de souscrire à l'amendement de suppression. Mais l'histoire des peuples et celle de leur langue me semblent trop intimement liées. Nos concitoyens qui vivent dans les régions sont attachés à cet héritage de leur passé.

M. Ivan Renar.- Celle de leur langue ou de leurs langues ?

M. Christian Cointat.- Notre patrimoine est vaste, il est vrai, mais les langues méritent un traitement séparé. Je pense à cette phrase d'un poète breton : « La Bretagne est une province de l'âme avant d'être une terre que l'on habite. » Elle vaut pour toutes les régions.

Je vous propose donc une autre façon de contourner l'obstacle. Pour éviter toute possibilité de conversion, périlleuse pour l'unité de notre République, des langues vernaculaires régionales en langues véhiculaires à côté du français, je propose de préciser qu'elles appartiennent à notre patrimoine culturel. L'adjectif, vous l'aurez compris, n'est pas anodin.

M. le président.  - Sous-amendement n°4 rectifié bis à l'amendement n° 95 de M. Hyest, au nom de la commission des lois, présenté par M. Charasse, Mme Goulet et M. Fortassin.

Compléter le second alinéa du I de l'amendement n°95 par une phrase ainsi rédigée :

Leur usage et leur pratique ne peuvent remettre en cause les principes constitutionnels d'indivisibilité de la République, d'égalité devant la loi et d'unicité du Peuple français.

M. Michel Charasse. - Nous n'avons qu'une alternative : ou bien adopter les amendements de suppression, avec lesquels je range le sous-amendement de M. Béteille, ou bien voter celui de M. Hyest. Dans ce dernier cas, je propose d'introduire une précision qui reprend les termes de la décision rendue le 15 juin 1999 par le Conseil constitutionnel, afin de nous mettre à l'abri de toute tentative de transposition à la hussarde de la Charte des langues régionales dans ses dispositions jugées incompatibles avec celles de la République française.

M. le président.  - Sous-amendement n°276 rectifié à l'amendement n° 95 de M. Hyest , au nom de la commission des lois, présenté par M. Détraigne, Mmes Férat, Dini, MM. Arthuis, Biwer, Deneux, Merceron, Nogrix, Jean-Léonce Dupont, Dubois et Pozzo di Borgo.

Supprimer les II et III de l'amendement n°95.

Mme Muguette Dini. - Nous demandons la suppression de l'alinéa qui vise à permettre une discrimination positive en faveur des femmes, disposition qui est bien loin du principe d'égalité, devise de la République, et bien en deçà du principe d'égalité entre les hommes et les femmes, [...]

Rappel au Règlement

M. Bernard Frimat. - Rappel au Règlement ! Nous sommes en train de mêler le problème des langues régionales et celui de l'égal accès des hommes et des femmes aux responsabilités professionnelles et sociales. Monsieur le président, ne pourrait-on faire un effort d'organisation et en finir d'abord avec les langues régionales ? L'examen de l'amendement du rapporteur ne pourrait-il être scindé en deux ?

M. le président.  - Il fallait le faire dès le début. Maintenant, le débat est engagé.

M. Michel Charasse. - Rien n'interdit de faire voter sur les amendements de suppression !

M. le président.  - Monsieur Frimat, l'amendement de M. Hyest est suivi de huit sous-amendements que je suis obligé de faire présenter dans la foulée. Ensuite, nous en reviendrons aux langues régionales.

M. Bernard Frimat. - Dont acte !

Discussion des articles (Suite)
[...]

M. le président.  - Amendement n°315, présenté par M. Lecerf.

Rédiger comme suit cet article :

L'article 1er de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La République participe au développement de la solidarité et de la coopération entre les États et les peuples ayant le français en partage. Les langues régionales appartiennent à son patrimoine ».

M. Jean-René Lecerf. La référence aux langues régionales nous met dans l'embarras. Je défends cet amendement tout en ayant cosigné l'amendement de suppression de M. Gélard, amendement qui a ma préférence.

M. Renar a cité le poète picard, Jules Mousseron. Il faut également être attentif au bicamérisme, donc aux souhaits de nos collègues députés...

M. Michel Charasse. - A condition de réciprocité !

M. Jean-René Lecerf. - Nous nous sommes inspirés de l'amendement de M. Legendre, en mentionnant le français avant les langues régionales, ce qui nous évite tout risque de ratification de la Charte européenne des langues régionales.

M. le président.  - Amendement n°57 rectifié, présenté par MM. Virapoullé et Lecerf et Mme Henneron.

Au début du premier alinéa de cet article, remplacer les mots : L'article premier par les mots : Le premier alinéa de l'article 2

M. Jean-René Lecerf. - Nous plaçons la référence aux langues régionales après celle au français, quoique les langues régionales n'aient pas grand-chose à faire dans un titre relatif à la souveraineté. L'essentiel pour nous, c'est que la référence au français arrive avant celle aux langues régionales ; nous voterons en conséquence.

M. le président.  - Amendement identique n°356, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin, Voynet, MM. Desessard et Muller.

Mme Alima Boumediene-Thiery. - L'article premier de la Constitution ne saurait devenir un fourre-tout ; nous déplaçons à l'article suivant la référence aux langues régionales, donc après celle au français. De même pour la référence à la parité et à l'égalité entre les sexes, qu'il s'agisse de l'accès aux responsabilités dans le domaine professionnel ou en politique : on ne saurait taire ces objectifs dans la Constitution alors qu'elle reconnaît la lutte contre les discriminations. Ces dispositions feront l'objet d'amendements ultérieurs.

M. le président.  - Amendement n°376 rectifié, présenté par MM. Legendre, Gouteyron, Marini, Romani, Bourdin, Duvernois, Fournier, Gaillard et Cointat.

Compléter le second alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :

Elle participe à un espace francophone de solidarité.

M. Jacques Legendre. - La Constitution, étonnamment, ne mentionne pas la participation de la France à l'ensemble solidaire des pays ayant le français en partage. Plusieurs tentatives ont été faites par le passé, en 1995 puis en 1996 et 1998 : le Sénat avait voté en faveur de cette mention, mais pas l'Assemblée nationale, malgré l'immense talent et les efforts constants de notre regretté collègue, Maurice Schumann. Les esprits n'étaient pas prêts pour la francophonie ; nous gageons qu'ils le sont enfin pour reconnaître ce fait de notre histoire qu'est la francophonie, tout comme nous devons à la géographie d'avoir une dimension européenne reconnue par la Constitution.

Nous devons avoir un débat de qualité sur les langues : il serait absurde d'opposer les langues régionales et la langue française, laquelle est la seule dont la République se serve, car c'est bien le français qui exprime notre façon de vivre ensemble.

Cependant, la Constitution ne saurait mentionner les langues régionales avant le français, c'est pour nous un impératif. Si la Haute assemblée devait maintenir la référence aux langues régionales, il nous faudrait en conséquence mentionner la francophonie dès l'article premier. Sinon, elle pourrait figurer à l'article 87. Qu'en pense le Gouvernement ?


M. Jean-Jacques Hyest. , rapporteur.  - L'Assemblée nationale, à côté du caractère indivisible, laïc, démocratique et social de la République, a voulu mentionner le patrimoine que représentent nos langues régionales, le plus riche en Europe, je le rappelle, puisqu'il ne comporte pas moins de 79 langues, y compris celles pratiquées outre-mer, et souvent en déclin.

M. Michel Charasse. - Elles n'ont pas toutes la même authenticité !

M. Jean-Jacques Hyest. , rapporteur.  - La question des langues est délicate, elle touche à l'identité nationale autant qu'au mode de vie et à la communication. Dans sa décision du 15 juin 1999, le Conseil constitutionnel a rappelé que seul le français est la langue de la République, obligatoirement utilisée dans la sphère publique. L'enseignement des langues régionales n'est pas inconstitutionnel, pour autant qu'il ne soit pas obligatoire et qu'il ne porte pas préjudice au service public de l'enseignement.

L'Assemblée nationale ne remet nullement en cause ce principe, ni ces règles, qui trouvent leur origine dans l'ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539. Le débat n'a certes pas été des plus limpides mais nos collègues députés n'ont nullement prôné de ratifier la Charte européenne des langues régionales.

Avis défavorable, par conséquent, aux amendements de suppression n°s3 rectifié, 77, 145, 157, 250 rectifié ter et 260 rectifié ter, et au sous-amendement n°304 rectifié.

Avis favorable au sous-amendement n°38 rectifié bis, qui insère « culturel ». A titre personnel, avis favorable au sous-amendement n°4 rectifié bis. Avis défavorable à l'amendement n°276 rectifié.

Nous avons déjà voté sur l'égalité en politique une disposition, qu'une décision du Conseil constitutionnel a empêché d'étendre au domaine économique et social. Nous n'avons fait que déplacer l'amendement adopté à l'Assemblée nationale : on peut être contre non le principe mais le fait d'inclure à l'article 34 ce qui trouve mieux sa place à l'article premier.

Avis défavorable aux sous-amendements n°s156 et 349 : à chaque jour suffit sa peine. « Favorise » dit déjà beaucoup. Le sous-amendement n°399 rectifié a permis de rappeler la place des handicapés, mais si la Constitution dressait de longues listes de catégories à protéger, on ne pourrait plus en dégager les grands principes : avis défavorable, ainsi qu'au sous-amendement n°400 rectifié.

L'amendement n°315 apporte une précision bienvenue. Toutefois, nous avons, et de loin, préféré l'amendement n°377 de M. Legendre qui viendra après l'article 31 et au profit duquel cet amendement pourrait être retiré. Les deux textes sont proches, mais celui de M. Legendre est plus complet.

Comme les auteurs des amendements n°s57 rectifié et 356, j'avais spontanément pensé traiter des langues régionales à l'article 2, après le français, mais cet article traite de la souveraineté.

M. Michel Charasse.  - C'est pire !

M. Jean-Jacques Hyest. , rapporteur. - L'article premier, au contraire, énonce des principes. Avis défavorable donc, ainsi qu'à l'amendement n°376 rectifié, auquel je préfère le 377.

Mme Rachida Dati, Garde des sceaux.  - Je répondrai d'abord sur les langues régionales dont traitent les amendements n°s3 rectifié, 77, 145, 157, 250 rectifié ter, 260 rectifié, les sous-amendements n°s304 rectifié, 38 rectifié bis et 4 rectifié, ainsi que les amendements n°s57 rectifié, 356.

La rédaction dont nous débattons est issue d'un amendement introduit par les députés et précisant que les langues régionales font partie du patrimoine de la France et je constate ici le désaccord profond du Sénat. Cette mention ne faisait pas partie du texte initial du Gouvernement.

M. Dominique Braye.   - On va vous aider...

Mme Rachida Dati, Garde des sceaux.  - Il ne s'agit pas d'une disposition normative susceptible de remettre en cause l'égalité devant la loi ou l'unicité de la République. Les députés ont voulu marquer dans la Constitution leur attachement à la reconnaissance des langues régionales : le projet annoncé par le Gouvernement leur semble une bonne chose mais ils voulaient une reconnaissance plus solennelle. Cela ne remet pas en cause l'article 2 qui affirme que le français est la langue de la République -certains d'entre vous avaient exprimé le même voeu lors du débat du 13 mai. Il ne s'agit pas de demander à l'administration l'utilisation d'une langue régionale ou de créer des droits pour des groupes mais de reconnaître que les langues régionales font partie de notre identité.

M. Michel Charasse.  - La bouillabaisse !

Mme Rachida Dati, Garde des sceaux.  - Les principes d'égalité devant la loi et d'unicité de la République demeurent. Aussi a-t-on inséré cette rédaction de compromis à l'article premier qui reconnaît la diversité. Je suis donc défavorable aux amendements de suppression.

M. Cointat propose de préciser qu'il s'agit de notre patrimoine « culturel », mais alors on pourrait mentionner aussi le patrimoine architectural ou historique. Évitons les adjectifs pour garder un caractère plus global à la rédaction : avis défavorable au sous-amendement n°38 rectifié bis.

Certains font valoir que la disposition serait plus à sa place à l'article 2. Il y a eu un débat à l'Assemblée nationale et le choix fait a été bon, car l'article 2 figure au titre premier qui traite de la souveraineté. Le français est la langue de la République comme il est la langue de la France depuis Villers-Cotterêts. En revanche, les langues régionales ont toute leur place à l'article premier qui vise l'organisation décentralisée de la République. (M. Jean-Pierre Raffarin sourit)

Sur les autres amendements, je ne serai favorable qu'à l'amendement n°95 présenté par le rapporteur. Avis défavorable aux sous-amendements n°s276 rectifié, 156, 349, 399 rectifié, 400 rectifié, 315 et 370. L'objectif de la parité a été reconnu par la loi constitutionnelle du 28 juillet 1999. L'Assemblée nationale l'a étendu au domaine économique et social en modifiant l'article 34 de la Constitution. M. Hyest propose de déplacer cette disposition à l'article premier, qui consacre la diversité tout en réaffirmant l'égalité des citoyens. Cette proposition tout à fait judicieuse rendra la rédaction plus claire et plus cohérente.

Oui, monsieur Detraigne, il est exact que la commission de réflexion sur le Préambule doit s'interroger sur l'égal accès des hommes et des femmes ; c'est pourquoi le Gouvernement s'était initialement déclaré défavorable à l'amendement lors du débat à l'Assemblée nationale, mais celle-ci s'est considérée suffisamment éclairée. Vous indiquez que le Préambule de 1946 est plus favorable mais la jurisprudence du Conseil constitutionnel en fait une application très stricte, affirmant par sa décision du 16 mars 2006 que la loi ne peut favoriser l'accès des femmes aux conseils d'administration ou de surveillance, aux comités d'entreprise ou sur les listes des élections prud'homales comme aux organismes paritaires de la fonction publique.

Certains considèrent au contraire que le législateur ne devrait pas seulement favoriser la parité. Je rappelle que le choix de ce terme avait fait l'objet de débats en 1999 et qu'il tend à maintenir la liberté d'appréciation du législateur. Je ne suis donc pas favorable à ce qu'on remette en cause l'équilibre trouvé à l'époque.

M. About souhaite indiquer que la loi favorise l'accès à l'emploi des personnes handicapées en mesure de travailler.

Le Président de la République a promis d'améliorer l'intégration des personnes handicapées, notamment par l'éducation et l'emploi. Des mesures en ce sens vous seront bientôt présentées par Mme Létard. Il semble donc inutile d'inscrire dans la Constitution un principe que de nombreuses lois ont déjà mis en oeuvre, la dernière remontant au 11 février 2005.

M. Nicolas About.  - S'ils sont mieux défendus que les femmes, je retire l'amendement !
 
Mme Rachida Dati, Garde des sceaux.  - Le Conseil constitutionnel accepte que le législateur adopte des mesures spécifiques en faveur des personnes handicapées. L'amendement est donc superflu.

Vous souhaitez également que la loi favorise le maintien en activité des personnes âgées de plus de 50 ans. Le Gouvernement vous proposera bientôt des propositions en ce sens. L'ajout constitutionnel est donc inutile.

MM. Lecerf et Legendre veulent consacrer dans la Constitution la coopération avec le monde francophone, qui regroupe 180 millions d'individus. La France est très attachée à la francophonie et travaille avec ferveur à son rayonnement. C'est pourquoi elle entretient le réseau des alliances françaises, des lycées français et des centres culturels. Elle s'appuie sur l'Organisation internationale de la francophonie et sur les sommets de chefs d'État. Cependant, le comité présidé par Simone Veil devant se prononcer sur la question, toute modification constitutionnelle sur ce sujet serait prématurée.

M. le président.  - Je mets aux voix les amendements de suppression.

M. Nicolas Alfonsi.  - Mes premiers mots seront pour dire que certains orateurs utilisent des comparaisons abusives avec la gastronomie ou les cathédrales. Le sujet est suffisamment sérieux pour éviter semblable comparaison.

Il me semble qu'un accord se dégage pour traiter cette question à l'article premier, même si l'opportunité de l'inscription reste controversée. Ces deux heures de débats viennent de symboliser l'influence de ceux qui veulent inscrire les langues régionales dans la Constitution. A ce propos, j'ai noté l'évolution très sensible du Gouvernement puisque, le 13 mai, à l'occasion d'une question orale avec débat, j'avais cru comprendre qu'il ne voulait pas aborder le sujet lors de la révision constitutionnelle. Or, l'Assemblée nationale a utilisé ce projet de loi pour le faire revenir sur sa position. J'ignore s'il compte éviter ainsi d'autres difficultés... Toujours est-il qu'il accepte maintenant d'aborder ce sujet au sein de l'article premier. A ce propos, M. Gouteyron éprouve un sentiment d'effilochage du texte constitutionnel avec cette phrase, j'en conviens, et je considère même que « culturel » accentue encore la chute.

Mais la vraie question est la suivante : la nouvelle rédaction de l'article premier modifiera-t-elle la position du Conseil constitutionnel à propos des langues régionales ? Y aura-t-il une innovation ? M. Charasse a rappelé l'indivisibilité de la République. Si l'ajout avait figuré à l'article 2, on aurait pu y voir une évolution sensible. Le Gouvernement a donc privilégié l'article premier, précisément pour que rien ne change et que la Charte européenne des langues régionales ne soit pas ratifiée.

Le débat étant lancé, je ne voterai pas les amendements de suppression.


M. José Balarello  - Je souhaite que la Constitution ne mentionne pas les langues régionales, car l'inverse serait source de contentieux. Des démagogues pourraient demander, sous prétexte de défendre l'identité d'un comté -je sais ce dont je parle- ou d'une province, que les arrêtés préfectoraux ou municipaux soient rédigés dans la langue locale. La même demande pourrait concerner les débats municipaux.

M. Michel Charasse.  - Comme au Moyen Age !

M. José Balarello  - Lorsque les autorités auront refusé ces demandes, nous assisterons à d'interminables contentieux largement médiatisés !

M. François Fortassin  - J'ai cosigné l'amendement de suppression déposé par M. Charasse, bien que je sois un militant des langues régionales puisque je pratique et j'ai même enseigné le gascon. Je comprends ceux qui souhaitent renforcer les langues régionales, dont la pratique s'étiole, mais la disposition dont il s'agit comporte un réel risque de dérive. Je veux conforter l'unité de la République et la laïcité. On peut être favorable aux langues régionales sans graver leur existence dans le marbre de la Constitution.

Aujourd'hui, nous ne nous exprimons pas en gascon parce que cette langue merveilleuse du Béarn a été abandonnée en raison du trop grand succès d'Henri IV. (Rires et applaudissements)

M. François Marc.  - La commission des lois a repris la disposition introduite par l'Assemblée nationale. Nous partageons son point de vue. Le 9 juillet 1999, s'exprimant dans un article intitulé Ne perdons pas notre temps, M. Fillon avait qualifié cette discussion de « débat entre ceux qui regardent l'avenir avec ses priorités et ceux qui pensent que la France a du temps à perdre pour vagabonder dans le passé ». Or, ce sujet n'est ni dérisoire ni anodin. Nous sommes tous citoyens du monde, son regard nous importe. Lors de sa dernière réunion, y a quelques jours, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations-unies a constaté avec préoccupation que l'État français n'avait pas fourni d'efforts suffisants dans la promotion des langues et du patrimoine culturel régional et minoritaire.

M. Patrice Gélard , rapporteur.  - N'importe quoi !

M. François Marc.  - Ce comité observe que l'absence de reconnaissance officielle des langues régionales et minoritaires a contribué au déclin constant du nombre de leurs locuteurs. Il recommande que la France accroisse ses efforts en la matière.

Surtout il recommande que l'État révise sa position concernant l'absence de reconnaissance officielle des langues régionales ou minoritaires dans la Constitution.

Les langues régionales sont menacées de disparition : la moitié d'entre elles n'existeront plus d'ici cinquante ans. Pour améliorer la situation, il faut donc une reconnaissance officielle. C'est pour cette raison que nous réclamons depuis des années qu'elles soient reconnues dans la Constitution. Le Gouvernement a d'ailleurs annoncé une loi pour mettre en valeur les langues minoritaires.

A la quasi-unanimité, l'Assemblée nationale a opéré une avancée remarquable. Si le Sénat supprimait cette disposition appréciée dans de nombreuses régions, ce serait une décision grave et fâcheuse qui ne resterait pas sans conséquences. Je suis donc opposé à ces amendements de suppression.


M. Robert Badinter.  - La France s'est faite aussi, et certains disent beaucoup, autour de la langue française. C'est une très longue histoire, qui n'a pas été facile. Ce long combat a mobilisé de nombreux républicains.

Dans le grand texte du rapport à la Convention sur l'éducation nationale, Condorcet commence ainsi : « La France compte 26 millions de Français. Six, seulement, savent lire et écrire dans notre langue ». Toute l'histoire de la République, et notamment de la IIIe République, a été une lutte pour que la France se soude autour de la langue française.

Fils d'immigrés je me souviens que mon père, farouche républicain et ardent patriote, interdisait à quiconque de parler une autre langue que le français chez lui. Je ne nie pas la grande richesse des langues régionales et chacun connaît les chefs d'oeuvre que nous leur devons. Il faut que ces langues continuent à être enseignées et fassent l'objet de travaux universitaires et de thèses. Mais cela implique-t-il que ces langues trouvent leur place dans notre loi fondamentale ?

Une constitution est un instrument qui sert à gouverner un pays en définissant les pouvoirs et leurs rapports respectifs. En clair, ce n'est pas un catalogue des richesses culturelles de la communauté nationale. Aujourd'hui, les langues régionales sont enseignées à l'école et dans les universités, elles ont toute leur place dans la vie privée et dans les associations.

Pourquoi devraient-elles être mentionnées dans la Constitution ? Il n'y a aucune raison, hormis une : lorsqu'en 1999, le gouvernement Jospin a signé la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, la question s'est posée de sa conformité à la Constitution et le Président de la République a saisi le Conseil constitutionnel. Celui-ci a rendu une décision particulièrement importante : « Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que la Charte européenne des langues régionales ou minoritaire, en ce qu'elle confère des droits spécifiques à des groupes de locuteurs de langues régionales ou minoritaires, à l'intérieur de « territoires » dans lesquels ces langues sont pratiquées, cette Charte porte atteinte aux principes constitutionnels d'indivisibilité de la République, d'égalité devant la loi et d'unicité du peuple Français ».

J'ai rarement trouvé des considérants d'une telle force.

« Considérant que ces dispositions sont également contraires au premier alinéa de l'article 2 de la Constitution, en ce qu'elles tendent à reconnaître un droit à pratiquer une langue autre que le français non seulement dans la vie privée mais également dans la vie publique à laquelle la Chartre rattache la justice et les autorités administratives et les services publics ».

On ne peut être plus clair : la Charte est incompatible avec notre Constitution. Mais dès l'instant où l'on modifie la Constitution, la jurisprudence du Conseil ne vaut plus car si les constituants ont voulu reprendre la question des langues régionales, c'est qu'ils avaient une idée derrière la tête. Reste à savoir laquelle. Et si d'aventure le Conseil constitutionnel devait examiner une nouvelle fois cette question, il le ferait au regard du nouveau texte. C'est pourquoi quand j'entends certains nous dire qu'il ne faut pas nous inquiéter car la jurisprudence du Conseil constitutionnel est constante, je réponds que tel sera le cas tant que la Constitution n'aura pas été modifiée. Dans le cas contraire, le Conseil constitutionnel se pencherait sur nos travaux préparatoires. C'est pourquoi je demande au Gouvernement de s'engager de façon très claire à ne ratifier en aucune manière la Charte européenne des langues régionales et minoritaires. (Applaudissements sur divers bancs au centre et à droite).

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - A l'unanimité, notre groupe a déposé un amendement de suppression pour que ne figure pas la référence aux langues régionales à l'article premier. Néanmoins, certains d'entre nous souhaitent que, d'une façon ou d'une autre, la Constitution fasse référence à ces langues, mais à un autre article. J'avais déposé un sous-amendement à l'article 2 pour dire que les cultures et les langues régionales font partie du patrimoine de la République. Il n'a pas été retenu pour une raison qui m'échappe.

M. Robert Bret.  - Fidèle défenseur de la langue française, je ne suis pas favorable à ce que des minorités se voient reconnaître des droits particuliers par la Constitution. La France, riche de ses diversités culturelles, doit rester une et indivisible car entre la loi et la personne, il ne peut y avoir d'intermédiaire. Quiconque intercale une communauté crée des droits particuliers pour ses membres et rompt avec l'unité et l'indivisibilité de la République.

Le français est la langue de la République comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel dans sa décision de 1999, mais sa décision ne vaut pas en cas de révision. Nous devons donc prendre nos responsabilités.

La découverte et l'apprentissage des langues régionales sont d'ores et déjà encouragés : l'État finance des postes d'enseignants pour ces langues. Il serait certes toujours possible de faire mieux. Mais nous ne pouvons faire droit aux spécificités de chacun car le propre de la loi est d'organiser la vie en société pour assurer collectivement la liberté et les droits de tous. Je suis donc favorable aux amendements de suppression. (Applaudissements sur les bancs CRC ; M. Jean-Luc Mélenchon applaudit aussi).

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Je n'ai pas l'habitude de m'opposer à la commission ni de voter contre l'avis du Gouvernement. Mais je considère qu'intégrer les langues régionales dans la Constitution est une erreur. Au fil des révisions constitutionnelles que j'ai connues, j'ai appris qu'il est très difficile de toucher à son article premier, article essentiel que beaucoup de nos concitoyens connaissent à défaut de connaître les autres. Et nous avons trois degrés de législation, la loi, la loi organique et la Constitution. La protection, le développement de l'enseignement des langues régionales relèvent à l'évidence de la loi.

M. Adrien Gouteyron.   - Très bien !

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Je juge enfin ce débat un peu dépassé, à l'heure où nos enfants et petits-enfants parlent plus volontiers le « texto » que le français. Si nous voulons préserver l'indivisibilité de la République et sa cohésion, mieux vaudrait renforcer l'enseignement de notre langue et lutter contre toutes ses déformations. (Applaudissements à droite et sur plusieurs bancs au centre)

M. François Autain.  - Je souhaiterais attirer l'attention sur l'utilisation inappropriée qui est faite de l'expression « langue régionale » ; ne rendant pas compte de la diversité des parlers qui existent dans une même région, elle contribue à l'appauvrissement de notre patrimoine linguistique.

Élu d'un département dont l'identité bretonne est toujours incertaine, je prendrai l'exemple des parlers pratiqués en Bretagne. Il n'existe pas une langue régionale unique mais un nombre important de parlers rattachés à cinq grands dialectes. Dans la région rennaise, on pratique le gallo, qui est un dialecte de langue d'oïl parlé en Bretagne orientale ; dans le reste de la Bretagne, dite Bretagne bretonnante, on dénombre quatre dialectes celtiques : le trégorois, le vannetais, le léonard et le cornouaillais. Et chaque dialecte se décompose en sous-familles, celles-ci étant si diverses que les linguistes ne se réfèrent qu'aux parlers qui les composent. Au sein du cornouaillais, on distingue ainsi les parlers du pays Bigouden, du Poher, du Cap Sizun ou encore du pays de l'Aven.

Les choses se compliquent encore si l'on considère qu'à l'intérieur même de ces zones, il existe des sous-dialectes spécifiques. Ainsi, le sous-dialecte du pays Bigouden diffère entre les locuteurs de Quimper et de ses alentours et ceux de la région de Douarnenez.

En organisant la promotion des langues régionales en Bretagne par le biais des écoles bilingues, qui enseignent une forme d'esperanto composé des différents parlers bretons, incompréhensible par ceux qui ont l'un de ceux-ci pour langue maternelle, on contribue à la liquidation d'un patrimoine linguistique bien plus riche dans la réalité que dans la description sommaire que je viens d'en faire. Je rappelle par parenthèse que cet esperanto breton a été inventé en 1941 par un admirateur du régime nazi.

Pour toutes ces raisons, les langues régionales ne doivent pas figurer dans la Constitution.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Je regrette qu'une réunion de la commission des affaires culturelles m'ait empêché d'assister à l'intégralité du débat. Je constate que l'unanimité s'est faite pour refuser la notion de « race », mais que le Sénat a choisi de la maintenir dans le Constitution ; et qu'une relative bienveillance à l'égard des langues régionales va le conduire à les exclure.

Je soutiens la rédaction de l'Assemblée nationale, même si elle peut encore être améliorée ; j'apprécie à ce titre, une fois n'est pas coutume, la proposition de M. Charasse. Il n'y a pas lieu, en revanche, de faire référence aux « racines », mot par parenthèse cher à Barrès, parce que nous parlons de cette mémoire collective, de ces vies croisées qui ont fait l'identité française. Le pédiatre Aldo Naouri, proche de la majorité, connu pour sa rigueur éducative et contempteur des choix hérités de 1968, décrit bien comment le très jeune enfant acquiert sa langue maternelle par l'abandon de dizaines de phonèmes qui lui auraient permis de maîtriser très tôt le « th » anglais ou le « j » espagnol ou arabe. L'existence de parlers locaux n'est pas une atteinte au français. L'initiation à d'autres phonèmes est utile pour l'acquisition des langues étrangères, c'est une fenêtre ouverte. Nous sommes ici au niveau de la comptine.

La sauvegarde des langues régionales, c'est un soin donné à un patrimoine fragile, humain, fait de toutes les curiosités. Le succès inattendu d'un film populaire, presque populiste, caricatural mais chaleureux, Bienvenue chez les ch'tis, a révélé l'évidence de résonnances pour un parler particulier qui fait lien et sens. Un journaliste du Monde diplomatique en a parlé comme du premier film populaire depuis La Bête humaine ; il fait du bien sans faire du mal.

Ainsi, inscrire les langues régionales dans la Constitution fait-il sens, message et symbole. Les Verts voteront contre les amendements de suppression. (Mme Alima Boumediene-Thiery applaudit)

M. David Assouline.  - Dans ce débat très riche, j'ai le sentiment que beaucoup combattent davantage des démons que la réalité. Nous sommes tous ici attachés aux principes fondamentaux de notre République. Leur construction est un combat jamais achevé : je comprends que certains craignent que la mention des langues régionales ne fragilise l'édifice. Mais si autant de doutes s'expriment, c'est qu'il se passe quelque chose dans la société, une menace peut-être pour l'unicité de la République, la laïcité, la langue française. Dans nombre de pays, le nationalisme et ses dangers ont surgi, jusqu'en Europe, dans les Balkans. A chaque fois, parce que des États autoritaires avaient imposé l'écrasement des minorités et de leurs langues, au lieu de les faire disparaître, il a préparé leur explosion. Il n'en a pas été ainsi en France, point de baïonnettes aux portes de la langue française pour faire triompher le séparatisme. Pourquoi être sur la défensive ? Ce qui fragilise le plus la langue française, jusque dans les actes les plus courants, c'est la langue anglaise ; la vraie menace est là.

Il est difficile pour un professeur d'éducation civique d'évoquer devant ses élèves le problème du racisme ; comment leur expliquer que les races n'existent pas mais que le mot figure dans la Constitution ?

M. Jean-Jacques Hyest , rapporteur.  - Nous avons voté sur le sujet.

M. David Assouline.   Je fais le lien entre les deux thèmes. Certains disent que lorsqu'on touche aux fondations, on fragilise l'édifice ; c'est une position défensive. Personne ici ne veut fragiliser notre langue. On s'inquiète de la façon dont on veut intégrer les langues régionales ; les aurait-on placées au même niveau que la langue française qu'on aurait craint la confusion. Je suis au total très embarrassé. J'ai le sentiment que beaucoup se battent non contre ce qui menace la République et son unicité mais contre des épouvantails.

M. Jean-Luc Mélenchon. - Je salue l'intervention de mon collègue M. Marc qui a sans doute convaincu la majorité du groupe socialiste mais sans me convaincre. Je déplore qu'on ait fait référence à un comité de l'ONU, qui n'est pas fondé à donner son appréciation sur la Constitution de la République française, puisqu'il ne reconnaît pas le principe de laïcité. L'ordre du monde est tel que nous devons prendre de grandes précautions pour préserver l'unité et l'indivisibilité de notre République. L'unité linguistique est un bien précieux, qui ne doit pas être confondu avec l'uniformité ou la répression des différences. C'est la condition même d'un espace public commun. On a beaucoup parlé de la sensibilité de ceux qui affirment que leur langue régionale fait partie de leur identité ; mais ils ne représentent que 7 % de la population. Pensons à la nouvelle France, à tous ceux qui, venus comme moi de l'immigration, parlent avec passion le français, langue de l'égalité, qui les a libérés individuellement et collectivement ! La France a fait son devoir, pour la diversité des langues, mais aussi pour l'intégration des enfants venus d'ailleurs.

M. Jean-René Lecerf. - Je regrette que la référence à la francophonie ait été rejetée par la commission et le Gouvernement : elle aurait permis que le français soit mentionné avant les langues régionales dans la Constitution. Dans ces conditions, je voterai les amendements de suppression.

M. Philippe Dallier. - En entendant notre collègue François Marc faire référence aux conclusions d'un comité Théodule du grand machin new-yorkais, probablement rédigées dans quelque volapük intégré (rires à droite), je n'ai pu m'empêcher de penser que nous étions le 18 juin et de me demander ce que le général de Gaulle aurait pensé de notre débat. (Marques d'approbation à droite) Pendant la campagne pour les dernières élections municipales, certains candidats ont cru bon de publier des documents de propagande électorale en langue étrangère : cela devrait nous interpeller et nous convaincre de la nécessité de protéger le français. Je suis sénateur d'un département où l'on rencontre des difficultés à intégrer des jeunes venus du monde entier ; la langue française peut nous rassembler. C'est pourquoi il me paraît inopportun d'introduire les langues régionales dans la Constitution. (Applaudissements sur de nombreux bancs UMP)

M. Bruno Retailleau. - Je voterai les amendements de suppression. Il ne s'agit pas de se prononcer pour ou contre les langues régionales ; mais ont-elles leur place dans la Constitution ? Non. D'abord, parce que le principal problème qui se pose aujourd'hui en France, c'est celui de l'apprentissage et de la maîtrise du français. Ensuite, parce que nous avons une responsabilité vis-à-vis du monde francophone. Un sommet de la francophonie doit avoir lieu à Québec en octobre 2008 ; M. Hervé Bourges a fait seize propositions intelligentes pour passer en la matière d'une posture défensive à une posture offensive. L'adjonction d'une référence aux langues régionales à l'article premier de la Constitution constituerait un très mauvais signe pour nos partenaires. (Plusieurs sénateurs de la majorité applaudissent)

M. Joseph Kergueris.  En écoutant nos échanges, j'ai constaté qu'il existait un double débat. D'une part, se pose la question de la pertinence juridique de l'inscription des langues régionales dans la Constitution : M. Badinter en a parlé avec talent. D'autre part, de nombreux intervenants se sont demandé si la référence aux langues régionales n'attentait pas à l'unité de la République, à sa laïcité, à la République elle-même. On a même évoqué les mânes du général de Gaulle (marques d'ironie à gauche), d'un homme qui a fini son discours de Quimper en breton, et qui avait un profond respect pour les langues régionales ! (Marques d'approbation sur divers bancs) J'appartiens à une région qui a son histoire et son identité, et ce qui fonde en grande partie cette identité, c'est sa langue. Enfant de ce pays, j'ai appris à la fois le breton et le français ; porté par tous ceux qui autour de moi parlaient le français, porté par les hussards noirs qui me l'ont appris, porté par ceux qui ne le parlaient pas et le regrettaient, j'ai acquis le sentiment d'appartenir à un pays républicain, uni et laïque. Mais nous souhaitons affirmer dans la Constitution que les langues régionales font partie de notre patrimoine, c'est-à-dire de ce que nous avons reçu de nos pères. Cette disposition n'est aucunement attentatoire à l'unité de la République. Certains nous ramènent aux années 1940, mais rappelez vous que les régions douées d'une forte identité -Bretagne, Alsace, Lorraine, Corse, Catalogne, régions ultramarines...-, régions profondément républicaines et laïques, ont donné tant d'enfants à la France ! (Applaudissements sur divers bancs)

M. Josselin de Rohan.  - Je suis le troisième Breton à m'exprimer dans ce débat, et je partage l'idée selon laquelle la langue bretonne est le ciment de notre identité. Vous parliez du 18 juin ; mais souvenez vous que les premiers à rejoindre le général de Gaulle furent les pêcheurs de l'île de Sein ! (Applaudissements sur divers bancs)

M. Jean-Luc Mélenchon. - C'est vrai.

M. Josselin de Rohan.  - Tous ne parlaient pas français, mais ils avaient le coeur français. Lorsque j'étais président du Conseil régional de Bretagne, nous avons consacré beaucoup de crédits à l'enseignement du breton, créé un Office de la langue bretonne, subventionné des programmes télévisuels en breton -même s'il est vain de doubler Colombo ou des dessins animés japonais en breton, comme font certains. (Rires) Mais c'est à la loi de donner les moyens de diffuser les langues et cultures régionales ; elles n'ont pas leur place dans la Constitution. (Applaudissements sur divers bancs)

M. Philippe Marini. - La Constitution doit définir des procédures et des normes pour l'organisation des pouvoirs publics et le fonctionnement de l'État. Elle n'a pas à définir notre patrimoine.

M. Alain Gournac.   - Absolument !

M. Philippe Marini. - Les langues régionales auraient peut-être leur place dans le préambule mais pas dans le corps du texte. C'est au nom de cette vision concrète, utile et pratique de la Constitution que je voterai les amendements de suppression. (Applaudissements sur de nombreux bancs au centre et à droite)

M. Henri de Raincourt  - Je demande une suspension de séance pour réunir mon groupe.

La séance, suspendue à 18 h 30, reprend à 18 h 50.

Mme Rachida Dati, Garde des sceaux.  - Je tiens à rassurer M. Badinter, l'intention du Gouvernement n'est pas de ratifier la Charte. N'oublions pas que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 15 juin 1999, l'a jugée contraire aux principes d'égalité, d'unicité et d'indivisibilité.

M. Henri de Raincourt  - Comme la plupart de nos collègues, nous avons énormément appris de ces échanges instructifs. Nos préoccupations sont communes : ce débat n'est pas partisan, il est national. La question qui se pose à nous est la suivante : comment servir notre pays en laissant s'exprimer les libertés locales, sous leurs formes les plus diverses ? Autrement dit, jusqu'où peut-on aller institutionnellement ? Nous considérons, au regard de ce qui a été déjà fait, et eu égard aux précisions que vient de nous donner Mme la ministre, qu'il est préférable de supprimer l'article.

A la demande du groupe socialiste, les amendements identiques n°s3 rectifié, 77, 145, 157, 250 rectifié ter et 206 rectifié sont mis aux voix par scrutin public. M. le président. - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 324
Nombre de suffrages exprimés 319
Majorité absolue des suffrages exprimés 160
Pour l'adoption 216
Contre 103

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements à droite et sur plusieurs bancs au centre et à gauche)

M. Jean-Jacques Hyest. , rapporteur.  - L'adoption de ces amendements de suppression de l'article premier A nouveau rendent sans objet, avec l'amendement n°95 de la commission, les sous-amendements n°s304 rectifié, 38 rectifié bis, 276 rectifié, ainsi que les amendements n°s315, 57 rectifié, 356, 4 rectifié et 376 rectifié.

La commission dépose un nouvel amendement portant article additionnel avant l'article premier. Si les auteurs des sous-amendements n°s156, 349, 399 rectifié et 400 rectifié décident de les maintenir sous ce nouvel amendement, je propose de poursuivre la discussion.

Les sous-amendements n°s399 et 400 rectifié sont retirés.

M. le président.  - L'amendement n°509, présenté par M. Hyest, au nom de la commission des lois, est ainsi rédigé :

Avant l'article premier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

 I.- L'article premier de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales. »

II.- En conséquence, le dernier alinéa de l'article 3 de la Constitution est supprimé.

Les sous-amendements identiques n°s156 et 349 deviennent en conséquence les sous-amendements n°s510 et 511 à l'amendement n°509.

Les autres sous-amendements sont retirés.

Le compte-rendu officiel

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Régions et Peuples Solidaires
« La peine» du 18 juin :  les sénateurs s’opposent à
la reconnaissance constitutionnelle des langues régionales
 

Le 18 juin 2008, les sénateurs ont rejeté l’amendement voté à la quasi-unanimité par les députés visant à intégrer la reconnaissance des langues régionales dans l’article 1 de la constitution française.

Alors que la France prendra la présidence de l’Union européenne le 1er juillet,  le vote du sénat enferme l’Hexagone dans une position archaïque contraire aux conventions européennes et internationales en matière de droits culturels. Dénués de fondements juridiques et moraux, les propos intolérants et humiliants de certains  sénateurs s’opposent à l’aspiration de millions de citoyens : le sondage CSA réalisé les 18 et 19 juin pour l’édition dominicale du quotidien « Ouest France » démontre que 68 % des Français sont favorables à la reconnaissance constitutionnelle des langues régionales.

Soucieuse de parvenir à un compromis respectueux de la démocratie culturelle, la fédération « Régions et peuples solidaires » propose aux parlementaires français de modifier l’article 2 de la constitution en ces termes : « La langue de la République est le français. Elle respecte et protège les langues régionales ».

Alors que 2008 a été proclamée « année internationale des langues » par les Nations-Unies, R&PS doit une nouvelle fois rappeler aux parlementaires que la diversité culturelle est une richesse, seule sa négation constitue un danger. 

Philippe Sour, chargé de communication R&PS.
Gaillac, le 24 juin 2008
ontact-presse : Philippe Sour - 06 13 52 05 48 – 
Régions et Peuples Solidaires - 2 carrièra Pech de Galez - 81600 Galhac.
contact@r-p-s.infowww.r-p-s.info


INFÒC

Position d'INFÒC envoyée au groupe CRC du Sénat qui a voté contre la reconnaissance des langues dans la Constitution
Mme Nicole BORVO
Monsieur Robert BRET
Groupe CRC
Sénat
PARIS
Madame, Monsieur,


Nous avons pris connaissance de votre déclaration, au nom du groupe communiste du Sénat, pour justifier votre opposition à la reconnaissance des langues –dites régionales dans la Constitution, que vous avez adressée à la « Convergencia Occitana » de Toulouse et qui nous interpelle.

Au-delà des incantations traditionnelles sur des menaces imaginaires qui pèseraient sur la « république une et indivisible » pour les uns, ou sur « l’égalité des citoyens » pour les autres (« égalité » qui n’existe que dans la Constitution, mais non hélas ! dans la réalité des faits), nous savons tous que nos langues historiques de France sont, elles, réellement menacées de disparition à court terme.
Nous connaissons tous aussi les difficultés et même les oppositions de certains pouvoirs publics, que nos langues et nos cultures rencontrent « sur le terrain » pour survivre. Nous savons tous enfin que l’amendement Toubon sur le français à l’article 2 de la Constitution a créé un obstacle insurmontable à l’adoption de toute loi et tout décret favorables au développement de nos langues et de nos cultures de France.
Alors, ou bien l’on supprime l’amendement Toubon dans l’article 2… et il ne sera plus nécessaire d’inscrire les langues de France dans un article de la Constitution ; ou bien l’on reformule cet article 2 dans le sens suivant : « Le français est la langue de la république qui respecte et protège les langues régionales ».

Se contenter de clamer son intérêt pour les langues, tout en maintenant l’obstacle majeur à leur épanouissement ne serait que pure hypocrisie et pur mensonge.
Dans le cadre de la « navette parlementaire » et du congrès de Versailles pour la révision de la Constitution, nous comptons sur votre sens de la démocratie pour respecter les vœux de la majorité des citoyens français (70% d’après le sondage CSA du 19/06/08), qui souhaite la reconnaissance constitutionnelle des langues et cultures de France.

Plan coralament
A Toulouse, le 24 juin 2008
Georges LABOUYSSE
Président de l’Association INFÒC




Les séparatistes ne sont pas ceux que l'on croit, par Christian Guyonvarc'h


Point de vue
LE MONDE | 25.06.08 | 13h35  •  Mis à jour le 25.06.08 | 13h35  

Le 18 juin, les sénateurs, par 216 voix contre 103, décidaient de repousser un amendement à l'article premier de la Constitution que les députés avaient adopté à la quasi-unanimité dans le cadre du projet de réforme des institutions : "les langues régionales font partie du patrimoine de la nation". Alors même que l'auteur de l'amendement lui déniait toute portée juridique de nature à ouvrir de nouveaux droits aux locuteurs, ce qui peut surprendre s'agissant de la loi fondamentale de la République, le Sénat a pourtant cru devoir donner raison à l'Académie française qui, quelques jours auparavant, s'était immiscée de façon étonnante dans le débat politique en jugeant que cette formulation portait "atteinte à l'identité nationale".

On pourrait croire l'Abbé Grégoire et Barrère, grands pourfendeurs des langues régionales en leur temps, ressuscités et l'on devine l'ombre de la guillotine purificatrice planant au-dessus de ces langues menaçant l'unité du pays. Il y a lieu de se demander si, à l'heure de la globalisation économique et culturelle, face au danger redoutable de l'uniformisation et du conditionnement des esprits, la République française n'a pas mieux à faire que de travailler méthodiquement à l'éradication du patrimoine immatériel de sa population. Car c'est bien de cela qu'il s'agit.

Le sondage que l'institut CSA a réalisé les 18 et 19 juin pour le compte du quotidien Ouest-France, auprès d'un échantillon national représentatif de 960 personnes âgées de 18 ans et plus, apporte une réponse des plus éclairantes. A la question "selon vous, l'inscription de la reconnaissance des langues régionales dans l'article premier de la Constitution est-elle une bonne chose car cela marque leur appartenance au patrimoine français ?", quelque 68 % des Français sondés ont répondu oui, tandis que 23 % seulement des personnes interrogées se rangeaient à l'avis des sénateurs et des académiciens. Voilà qui questionne sur la représentativité des uns et des autres.

MONDE MULTIPOLAIRE

Ce sondage apporte d'autres enseignements particulièrement précieux. Alors qu'on pouvait imaginer un clivage entre Paris et les régions où les langues en question sont traditionnellement pratiquées, il n'en est rien. Au contraire même, car 69 % des Franciliens interrogés adhèrent au principe d'une reconnaissance des langues régionales dans la Constitution. Tout aussi instructive est la comparaison des réponses par classe d'âge puisque l'adhésion à ce principe est d'autant plus forte que le sondé est jeune : 80 % chez les moins de 30 ans.

Loin d'être les ferments de division ou de glorification du passé que leurs adversaires aiment à caricaturer, les langues régionales apparaissent tout au contraire comme un symbole d'unité des Français et un enjeu pour l'avenir. Car les Français et particulièrement les plus jeunes d'entre eux ont compris que c'est en cultivant ses différences intrinsèques que la République française pourra agir avec efficacité pour un monde multipolaire et divers, gage d'une paix durable car fondée sur l'unité dans le respect mutuel. Oui, en vérité, les vrais séparatistes ne sont pas ceux que l'on croit.

Christian Guyonvarc'h est vice-président du conseil régional de Bretagne, chargé des affaires européennes et internationales.

L'article du Monde
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Langues régionales : Jaurès, Cachin et les autres


L'HUMANITÉ
Politique - Article paru le 27 juin 2008 -
Politique Langues régionales : Jaurès, Cachin et les autres

Institution . Le rejet par le Sénat de la reconnaissance des langues régionales comme patrimoine de la nation dans la Constitution illustre le choc de forces contradictoires en Europe.

« Les langues régionales font partie du patrimoine de la France, c’est tellement évident. Mais pourquoi l’inscrire dans la Constitution ? » Le sénateur communiste du Nord, Ivan Renar, a refusé avec une majorité d’élus de l’Assemblée la référence aux langues régionales « patrimoine de la nation » dans l’article 1 de la Constitution. Le rejet à une large majorité des sénateurs d’inscrire l’amendement voté par l’Assemblée nationale intervient au lendemain de la déclaration de l’Académie française qui parle « d’atteinte à l’identité nationale ».

Le vote du Sénat et l’intervention musclée de l’Académie ont évidemment provoqué de vives réactions dans les régions. Étonnement en Bretagne, dans le Sud occitan, jusqu’en Alsace… Les partisans de la reconnaissance pleine et entière des langues régionales accusent les sénateurs de se replier sur des dogmes dépassés, et ils citent les exemples de pays européens (l’Espagne en premier lieu) qui admettent la diversité de leurs langages. L’Institut d’Estudis Occitans, qui regroupe des associations de promotion de la langue occitane, souligne que « les sénateurs n’ont pas bien compris que la diversité linguistique était un enjeu majeur pour les années qui viennent ». Tous revendiquent que la France ratifie la charte européenne des langues régionales ou minoritaires que le Conseil constitutionnel avait écartée en 1999.

La polémique, qui n’épar-gne pas les élus communistes (certains rappellent les grands dirigeants socialistes ou communistes défenseurs des langues régionales, Jaurès et Cachin les premiers), ne peut être résumée à un vieux débat entre jacobins souverainistes et girondins. La façon dont se construit le territoire européen, son organisation rampante entre grandes régions économiques (et linguistiques) modifie les modes de vie et de pensée. Même si, comme le fait remarquer le vieux poète occitan Félix Castan, le nombre de locuteurs jeunes des langues régionales diminue et la langue française évolue plus dans les quartiers. S’il y a eu incontestablement un regain des langues régionales à partir des années soixante-dix, le mouvement semble aujourd’hui stagner.

Ivan Renar admet que « la promotion des langues et des cultures régionales est un élément de culture important », mais il rejette « un enfermement régionaliste ou communautariste ». Le sénateur communiste remarque que les plus fervents soutiens publics aux cultures régionales sont les collectivités au moment où on déshabille le ministère de la Culture. Pas de faux procès donc. Une des raisons pour lesquelles le groupe communiste et républicain a déposé une proposition de loi inscrivant l’apport des cultures et des langues régionales dans un autre article de la Constitution. La sénatrice du groupe, Nicole Borvo Cohen-Seat, a souligné « comprendre l’émotion suscitée par notre prise de position par tous ceux qui luttent depuis des décennies en faveur de la reconnaissance de ces langues. Nous avons partagé ce combat, nous en sommes toujours… »

Jacques Moran

L'article de l'huma

Les Français favorables aux langues régionales
dans la Constitution (sondage)


21/06/2008-[12:17] - AFP
RENNES, 21 juin 2008 (AFP)

Les Français sont largement favorables à l’inscription de la reconnaissance des langues régionales dans la Constitution, selon un sondage CSA pour l’édition dominicale du quotidien Ouest-France.

68% des Français se déclarent favorables à l’inscription de la reconnaissance des langues régionales dans l’article premier de la Constitution, contre 28% qui ne s’y déclarent pas favorables, et 4 qui ne se prononcent pas. Ils sont également 70% à estimer que cette inscription des langues régionales dans la Constitution est "plutôt une bonne chose car cela marque leur appartenance au patrimoine français".

Ils ne sont par contre que 23% à trouver que ce serait "plutôt une mauvaise chose, car cela constituerait une atteinte à l’identité nationale". 7% ne se prononcent pas. Les sénateurs ont adopté le 18 juin un amendement supprimant la référence aux langues régionales dans la Constitution, ajoutée au texte par les députés. Ce sondage a été réalisé les 18 et 19 juin par téléphone sur un échantillon national de 960 personnes, représentatif de la population française, âgées de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas, après stratification par région et catégorie d’agglomération.

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